Le monde compte une vingtaine de ces nouveaux fonds. D’où viennent-ils ? De la Chine, de la péninsule arabique, de la Libye (Lybian Investment Authority), de l’Algérie, pour la quasi-totalité. Leur surface financière est énorme. Aujourd’hui, elle est estimée à 2500 milliards de dollars. Certains banquiers avancent que leurs actifs vers 2015 atteindraient 12 à 15 mille milliards. A titre d’exemple l’Abu-Dhabi Investment Authority pèse déjà 875 milliards de dollars.
Comment se financent-ils ? D’une part des réserves de leur banque centrale respective, des réserves pour les retraites, des fonds tirés de l’exploitation des matières premières.
Nous sommes habitués aux sommes gigantesques utilisées par les fonds dits « classiques » qui bouleversent entièrement le capitalisme, ravagent des secteurs entiers de l’industrie par l’obsession du retour sur investissement, incitent aux délocalisations sans que les Etats ne leur établissent la moindre résistance. Ainsi pour les fonds établis dans le Delaware, la publication des comptes n’est-elle pas obligatoire.
Le discours estival de la chancelière Merkel contre les fonds souverains ne se comprend pas de prime abord, les Etats-Unis prennent son relais dans la protestation quand le Royaume-Uni adopte une attitude réaliste, pragmatique.
Les fonds souverains proviennent de pays émergents ou renaissants telle la Russie qui bouleversent les rapports de force entre les pays dits riches, et ceux qui les financent aujourd'hui. Ces nouveaux Etats sur la place financière veulent rentabiliser au mieux leurs réserves monétaires en dollars au lieu de les réinvestir systématiquement en bons du Trésor US. Muriel Motte l’observe justement dans un article paru dans Le Figaro le 27 juin dernier « C'est là toute la révolution annoncée. L'Amérique, qui n'épargne pas un sou, daigne qu'on lui prête de l'argent à bon prix pour boucler ses fins de mois difficiles. Mais ses créanciers veulent aujourd'hui devenir actionnaires. " Dans tous les cas, le passage du statut de prêteur à celui de propriétaire provoquera des réactions défensives, pas seulement aux États-Unis ", prévoit Stephen Jen, économiste de la banque Morgan Stanley, qui n'a pas oublié la levée de bouclier américaine lors de la tentative de rachat de la compagnie pétrolière Unocal par l'entreprise publique chinoise Cnooc il y a deux ans. »
Les fonds souverains misent également sur la rentabilité maximale de leurs ressources énergétiques pour gagner en puissance et établir un nouvel équilibre géopolitique. Nous assistons à la construction du monde multipolaire illustré par la donne financière. Ne négligeons pas le rôle que tiendront les diasporas (nationale, religieuse) dans la stratégie de ces fonds étatiques.
Les craintes énoncées, ici, par les Etats occidentaux sont fondées en ce sens qu’ils prennent, enfin, la mesure, du bouleversement inéluctable des relations internationales. Comment pourront-ils résister par des mesures protectionnistes en étant dépendants de cette nouvelle politique stratégique des pays émergents ? Ces derniers voulant maîtriser leur pétrole, leur gaz…etc. Détail ironique, le dollar, émis par les USA, sert leurs ambitions.
A titre d’exemple, citons la montée en puissance de la contestation politique dans les couches les plus élevées de la péninsule arabique lesquelles s’agacent de devoir toujours acquérir à la demande de Washington du matériel américain pour leur éviter de licencier, d’investir dans des bons du Trésor en dollars quand cette monnaie se déprécie ?
©copyright Jean Vinatier 2007
Lien : Principaux fonds souverains http://en.wikipedia.org/wiki/Sovereign_wealth_fund