Info

Nouvelle adresse Seriatim
@seriatimfr
jeanvin22@gmail.com



jeudi 24 juillet 2008

USA les élections singulières IV :Obama et “le besoin d’Amérique” N°253 - 1ere année

Le candidat républicain John McCain broie du noir : le New York Times refuse un de ses articles, les journalistes traînent les pieds pour le suivre, les derniers sondages le placent nettement en arrière du candidat démocrate!
Pendant ce temps, Barack Obama entame une tournée européenne, juste après sa visite en Israël, en Allemagne aujourd’hui, en France, demain. Tous les sondages montrent que le candidat démocrate jouit d’une grande faveur auprès des populations qui apprécient sa jeunesse, ses racines africaines et, pour tout dire l’Amérique souriante. Wall Street, elle-même, se met dans le vert, le cours du pétrole recule. Bref, l’air deviendrait-il « obamien »?
Roger Cohen dans un article publié le 20 juillet dans l’
IHT reprend la remarque du social-démocrate allemand le comte Karl-Théodore Zu Guttenberg : « Obama ne doit pas donner l'impression que tout va changer. Il doit instaurer un climat de confiance, mais pas surcharger les visions. »¹
« Climat de confiance », telle est l’expression la plus juste au terme des deux mandats de Georges Bush qui menèrent le pays au bord du gouffre financier et militaire. Les élites atlantistes espèrent beaucoup de cette image promenée à travers le monde d’un jeune sénateur brillant et habile qui paraît croire au rêve. Le « j’ai un rêve » de Martin Luther King qui concernait une espérance purement américaine devient, maintenant, un slogan publicitaire global. A côté, John McCain fait pâle figure, petit, âgé, répétant à l’envi qu’Israël est menacé plus que jamais. Il ne réussit pas à se démarquer de la période bushienne. Barack Obama, sans faire du Clinton, donne toutes les assurances que l’on veut tout en restant flou : la conquête de l’opinion internationale pour réussie qu’elle soit n’a que peu d’impact sur l’électorat américain. Ce dernier veut d’abord avoir des assurances sur la pérennité de son modèle et de son style de vie.
La publication par la FED du
Beige Book sur les tendances et les perspectives du moment n’a rien d’encourageant. Elle craint un ralentissement économique généralisé dans tout le pays : activité, consommation, industrie, immobilier... tout chute, dégringole, vacille, s'enlise, s'embourbe. On oublie les millions d’Américains qui vivent grâce aux coupons alimentaires et ceux qui quittent ruinés leurs maisons et leurs appartements. On met de côté la fragilité de certaines entreprises mythiques tels General Motors et les réassureurs Fannie Mae et Freddie Mac. Le secrétaire d’état Paul Hanson annonce plan de sauvetage sur plan de sauvetage mais tout ceci reste bien fragile : rien ne s’est encore redressé !
Sur le plan extérieur, l’échec en Mésopotamie et l’impossible victoire en Afghanistan plombent le crédit militaire de l’Amérique. Le retour des combattants dans leur pays se fait dans des conditions lamentables et c’est l’électorat de base qui voit les mutilés errés à travers le pays presque livrés à eux-mêmes.
Il y a, bien sûr, tout le potentiel de l’homme américain qui peut très rapidement s’il est derrière un homme d’Etat qui le comprend retrousser les manches et repartir de plus belle. Cependant, les Etats-Unis de 2008 ne sont pas ceux de la Grande dépression. Le pays est à un tournant : si son hyperpuissance quoique admise ne la garantit plus de l’obéissance mondiale, les autres nations qui croissent (Inde, Chine, Russie, Brésil, péninsule arabique, Turquie…etc) ne sont pas en mesure de la contrebalancer et l’Union européenne, qui pourrait être une force stabilisante, a une peur bleue de revenir sur la scène du monde. On le voit bien, « le besoin d’Amérique » n’est pas une simple vue de l’esprit ni davantage une adhésion au modèle étatsunien mais, peut-être, la volonté de garder une hyperpuissance pendant une durée déterminée, le temps pour les pays précités de prendre le relais.
Philippe Grasset dans Defensa.org écrit qu’ « il est possible, peut-être même est-il probable que le jeune sénateur de l’Illinois va se sentir, un peu vite, devenir un héros et un homme d’Etat avant même d’être élu. » C’est là une observation intéressante. La distance qui existe entre l’homme en campagne électorale et l’image qui se fait autour de lui au risque, qui sait, de le transcender, aurait-elle des conséquences négatives ? L’enjeu pour ceux qui apportent leurs soutiens à Barack Obama et ceux qui font du business, le drapeau étoilé dans le dos est bel et bien de garder toute crédibilité au slogan « America first ». L’image idéalisée de Barack Obama doit susciter le « besoin d’Amérique » à l’extérieur (le Japon, la Chine, les monarchies du Golfe assurent le quotidien des Etats-Unis par leurs créances), à l’intérieur des Américains qui s’interrogent devant la progression des hispanophones lesquels exigent de plus en plus l’usage de leur idiome dans les actes administratifs. Le We are you ? de Samuel Huntington est toujours d’actualité ! La société américaine est jeune - l’acte d’indépendance est de 1776 – et on peut considérer la victoire du Nord contre le Sud en 1864 comme sa véritable naissance. Est-il, alors surprenant, que cette société tienne à parfaire son modèle ?Après tout les Etats-Unis ne reconnaissent l’égalité des droits Blancs/Noirs que depuis 1965 !
« Le besoin d’Amérique » pèse sur les épaules des deux compétiteurs. Pour l’heure Barack Obama surfe sur les vagues de la félicité quand McCain s‘embourbe. « Le besoin d’Amérique » entre également dans les réflexions politiques sur tous les continents parce que le mot « besoin » devrait avoir un sens de répartition et de partage. Nous sommes bien devant des élections singulières.

©Jean Vinatier 2008

Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à :
jv3@free.fr

Sources :


http://www.guardian.co.uk/world/2008/jul/23/johnmccain.barackobama
1-http://www.iht.com/articles/2008/07/20/opinion/edcohen.php?

In Seriatim :

http://seriatim1.blogspot.com/2008/01/usa-les-lections-singulires.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/02/usa-les-lections-singulires-ii.html

1 commentaire:

Mamaroro a dit…

Une nouvelle analyse pleine de clairvoyance: etant actuellement aux Etats-Unis, je peux temoigner de ce que les Americains vivent actuellement une enorme periode de depression tant morale qu'economique.

Beaucoup sont outres de ce que les medias presentent deja Obama comme etant elu, laissant presager un scenario similaire a celui de 2004, ou l'on se rappelle que John Kerry etait le grand favori du monde entier, en sus des medias, mais qu'il fut rejete par les Americains en raison de sa supposee faiblesse, de son orientation trop socialiste, ainsi que d'un manque d'interet pour les vrais problemes des Americains. Obama presente ces memes "faiblesses" au regard de la majorite de l'electorat americain, fortement influence par l'extraordinaire outil de propagande neo-conservateur... je ne vois pas beaucoup d'espoir pour autre chose qu'une enorme desillusion dans l'opinion publique mondiale qui attend de voir le Kennedy noir prendre les commandes de la premiere puissance mondiale.