Cyril Musila est expert et consultant de l’OCDE sur la gouvernance dans les Etats fragiles (post-conflits), chargé de cours de géopolitique des conflits à l’Institut Catholique de Paris, chargé de cours de géopolitique des matières premières à l’Ecole Internationale des Sciences de Traitement de l’Information (EISTI – Cergy). Au sein d’International Focus, il dirige le programme « Observatoire de la Reconstruction et du Développement de la Région des Grands Lacs ».
Valérie Fert, fondatrice et directrice générale d’International Focus, qui se spécialise dans l’ingénierie stratégique internationale, m’a donné l’autorisation de reproduire et de diffuser ce document dans le cadre de Seriatim. Je la remercie vivement.
"Quels sont les enjeux politiques et économiques des conflits des Grands Lacs,
en particulier à l'Est de la RDC ?
Depuis la fin des années 80, le coeur de la région des Grands Lacs – Burundi, Est de la République Démocratique du Congo, Rwanda et le sud-ouest del'Ouganda – est agité par un tourbillon de conflits. D'abord internes, ils sont entrés en résonance les uns avec les autres, jusqu'à constituer un conflit régional. De manière synthétique, on peut dire que les enjeux majeurs qui ressortent sont au nombre de quatre.
En premier lieu, il s'agit de crises politiques internes qui ont vu s'épuiser le système des partis uniques mais aussi l'effondrement des blocs Est-Ouest, qui protégeaient en quelque sorte ce système monopartite militarisé. La crise économique - chute des cours du café et du thé notamment - les effets conjugués des politiques d'ajustement structurel du FMI et de la Banque Mondiale (chômage massif d'anciens fonctionnaires purgés des administrations) ont créé des tensions sociales alors que les revendications du multipartisme se faisaient plus insistantes devant des régimes qui ne voulaient pas lâcher leur pouvoir.
Dans ce contexte de mutation, plusieurs conflits liés à la nationalité, à l'identité, aux tensions foncières, au retour des réfugiés ou à l'accès au pouvoir ont été instrumentalisés jusqu'à dégénérer en massacres plus ou moins circonscrits ou généralisés. Mais, jusqu'à la première moitié des années 1990, chacun des pays était confronté à ses propres problèmes.
En second lieu, il y a le vide géopolitique et la recherche du leadership régional. Jusqu'au début des années 1990, l'équilibre régional était garanti en quelque sorte par le leadership du président zaïrois Mobutu. Néanmoins, fragilisé de l'intérieur par l'opposition et, de l'extérieur, par une série de sanctions internationales ainsi que par la perte de l'appui dont il jouissait auprès des puissances occidentales, il avait perdu cette autorité. Dès lors, cette place vacante était à occuper. Ainsi, de « nouveaux leaders africains », pour reprendre l'expression du président Bill Clinton, devaient être promus. Ce dernier se référait aux présidents Museveni en Ouganda, Isaias Afeworki en Erythrée et Paul Kagame au Rwanda ainsi qu’au Premier ministre éthiopien, Meles Zenawi. Dans la région des Grands Lacs, deux présidents appartenaient donc à cette catégorie des nouveaux leaders. Engagées dans la guerre en RDC, au sein d'une coalition militaire en appui à une rébellion contre le gouvernement congolais, les armées ougandaises et rwandaises s’opposèrent finalement pour contrôler certains territoires congolais. Cette guerre « fratricide » est la traduction de la lutte pour le leadership régional.
Le troisième enjeu est la recomposition géopolitique. Entre avril et juillet 1994, la guerre civile au Rwanda a dégénéré dans un génocide des Tutsi et Hutu de l'opposition. Un afflux de fugitifs et réfugiés(plus d'un million de personnes) ont trouvé asile dans des camps de réfugiés installés dans le Nord et le Sud Kivu, à l'Est de la RDC et aux portes du Rwanda. Parmi ces fugitifs, se trouvaient des milices et membres de l'ancienne armée, impliqués dans le génocide et constituant une menace pour le Rwanda. Le démantèlement de ces camps et la dispersion de ces populations ont contribué à fragiliser les équilibres et à généraliser l'insécurité à l'Est de la RDC. La guerre civile, puis régionale, qui a éclaté en RDC a opposé une rébellion et l'armée congolaise, toutes deux appuyées par deux coalitions d'armées étrangères. Au total, ce furent jusqu'à une dizaine de pays africains qui se retrouvèrent engagés directement ou indirectement dans ce conflit. Mais, au-delà de cette guerre, une nouvelle géopolitique se dessinait petit à petit à partir du Rwanda où le nouveau pouvoir, constitué d'anciens réfugiés et rebelles venus de l'Ouganda, était anglophone. Par son influence, le Rwanda basculait vers « l'anglophonie ». La guerre à l'Est de la RDC a été alors analysée comme une tentative de faire basculer la RDC francophone vers l'influence anglophone.
Le quatrième et dernier enjeu est économique. Il s'agit du contrôle des ressources naturelles (bois et minerais) de cette partie de la RDC. En effet, des groupes armés, des rébellions et certaines armées étrangères se sont répartis le territoire national de la RDC en y exploitant ses ressources. Dès lors, la guerre pouvait se financer de l'intérieur tout en favorisant une économie de guerre faite de contrebande et de trafic illégal de ces ressources.
Dans les repositionnements stratégiques observés pour le marché de la reconstruction post-conflit, quelles sont les forces en présence ?
Les institutions internationales, en particulier la Banque Mondiale et les agences des Nations Unies, sont les premiers acteurs présents sur ce marché. La première a, par exemple, été l'artisan du nouveau code minier congolais. L'ONU est très présente avec ses « peace keepers » de la Mission des Nations Unies au Congo (MONUC). Les Etats fournisseurs d'officiers de commandement ou de soldats sont sans nul doute assez bien positionnés pour disposer d'informations de premier plan.
Les Etats-Unis sont également très présents à travers leur agence d'aide (USAID) et de nombreuses ONG dont le rôle d'observateur avisé me semble important. De même, l'Union Européenne en tant qu'institution communautaire ou à travers ses membres est très active : la Grande-Bretagne et les Pays-Bas me semblent les plus engagés à l'heure actuelle. L'influence française est plus politique, aussi bien au niveau de l'Union Européenne qu'au niveau du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Ces efforts étatiques privilégient la remise en place de l'Etat, après avoir soutenu le processus électoral : la réforme de l'armée, la consolidation des institutions, etc., tout en veillant sur le volet humanitaire et du respect des droits humains. En puissance africaine, l'Afrique du Sud est bien présente, aussi bien dans la sphère politique et diplomatique qu'économique, à travers des accords bilatéraux sur l'énergie, les communications ou les minerais. Je mentionnerai également l'Angola dont les projets conjoints avec la RDC cherchent à « sécuriser » sa production pétrolière dans l'Enclave de Cabinda – territoire angolais coincé entre l'Atlantique, la RDC et le Congo-Brazzaville.
Dans le domaine économique, la Chine s'est ouvertement positionnée comme acteur majeur de la reconstruction en RDC. Avec un contrat d'exploitation de concessions minières contre une dizaine de milliards de dollars et la réalisation de travaux d'infrastructure, la Chine voudrait lancer des chantiers de grande ampleur. Les pays arabes se sont quant à eux engagés dans le marché de l'hôtellerie de luxe.
Quels sont les pistes et les secteurs à reconstruire ?
En sortie de conflit, si l’on excepte une partie du Nord Kivu où persiste une poche de guerre, la RDC se présente comme un Etat où tout est à faire : des infrastructures de transport et de télécommunications au système administratif à moderniser, en passant par les secteurs touristique et minier, les structures bancaires, les technologies de l'information ou les réformes institutionnelles. La RDC est un pays chantier.
De nombreuses opportunités existent dans tous ces domaines où un tissu de PME recherche des partenariats pour devenir compétitives localement, régionalement ou internationalement.
Que peut-on dire des influences asiatiques – arabes, indiennes, chinoises – et de leurs impacts sur la reconfiguration des pôles émergents dans les Grands Lacs ?
Les influences asiatiques sont la principale caractéristique de l'économie africaine de ces débuts du 21e siècle. La RDC n'échappe pas à cette tendance lourde. Il apparaît en effet que l'économie africaine et ses acteurs ont trouvé en Asie un dynamisme qui semblait leur faire défaut. Dans l'Est de la RDC, par exemple, cette énergie, véhiculée par des grands commerçants du Kivu, a introduit une dynamique qui contraste avec les effets de la guerre encore visibles (camps de populations déplacées par exemple). Ainsi observe-t-on plusieurs phénomènes liés au commerce avec les Asiatiques : le boom immobilier dans les villes de Goma, Bukavu ou Beni, la rénovation du parc automobile avec des véhicules neufs ou d'occasion ayant le volant à droite, l'importance commerciale et financière de la ville de Butembo, etc. L'émergence de Butembo comme nouvel axe est liée aux connexions établies par les commerçants congolais Nande, et leurs partenaires indopakistanais ou chinois, avec le triplet asiatique Dubaï-Mumbai-Ouangzhou. Il s’agit là d’une nouvelle donne économique et commerciale afro-asiatique dont il faut observer attentivement l'évolution dans l’est de la RDC.
Comment l’idée d'une base d'informations et de données présentant la région des Grands Lacs et ses opportunités aux entreprises, aux investisseurs, aux organisations d’Etat, est-elle née ?
Dire qu'il y a du « business » à faire en RDC ne suffit pas. Il faut disposer d’informations pointues, de terrain, actualisées en permanence. Il faut pouvoir bénéficier d’analyses, d’anticipations d’experts qui connaissent parfaitement la région et sont aussi capables de mettre l’information dans une perspective globale. Or, ces informations, qui existent, ne sont regroupées nulle part. Il y a donc un véritable manque pour tous ceux intéressés tant par les investissements, les affaires que la coopération et l’expertise internationale. En accompagnant sur place plusieurs entreprises européennes intéressées par tel ou tel secteur, j’en ai fait l’amère expérience avec tout son corollaire de débauche d’énergie, de perte de temps et, in fine, de découragement.
Concrètement, que trouvera-t-on dans cet observatoire ?
International Focus et Investissement Stratégie Grands Lacs (ISGL) mettent en place un outil dont les résultats seront d'ici peu à la disposition des décideurs des Etats concernés - Burundi, Ouganda, RDC, Rwanda et d'autres comme la Tanzanie ou l'Angola plus tard – mais aussi des entreprises ou de la coopération internationale. Cet observatoire comprendra une base de données constamment actualisées, un recensement des chaînes de valeur, des analyses pointues, des scénarios et des perspectives : autant d’éléments qui accompagneront les processus de décision. L'ambition de cet observatoire des dynamiques de reconstruction est de fédérer, croiser des informations existantes mais éparses et de dégager des indicateurs pour évaluer ce qui a été fait, ce qui reste à faire et surtout les décisions à prendre.
Cyril Musila "
Jean Vinatier
©SERIATIM 2009
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Lien :
http://www.inter-focus.com/ ou http://www.inter-focus.eu
Pour aller plus loin :
Découvrez l’interview de Cyril Musila sur le Rwanda, le 13 Janvier 2009 à 19h30, sur KTO,
canal 73 (Numericable) ou 172 (Canalsat), ou retrouvez-la sur le site Internet
Valérie Fert, fondatrice et directrice générale d’International Focus, qui se spécialise dans l’ingénierie stratégique internationale, m’a donné l’autorisation de reproduire et de diffuser ce document dans le cadre de Seriatim. Je la remercie vivement.
"Quels sont les enjeux politiques et économiques des conflits des Grands Lacs,
en particulier à l'Est de la RDC ?
Depuis la fin des années 80, le coeur de la région des Grands Lacs – Burundi, Est de la République Démocratique du Congo, Rwanda et le sud-ouest del'Ouganda – est agité par un tourbillon de conflits. D'abord internes, ils sont entrés en résonance les uns avec les autres, jusqu'à constituer un conflit régional. De manière synthétique, on peut dire que les enjeux majeurs qui ressortent sont au nombre de quatre.
En premier lieu, il s'agit de crises politiques internes qui ont vu s'épuiser le système des partis uniques mais aussi l'effondrement des blocs Est-Ouest, qui protégeaient en quelque sorte ce système monopartite militarisé. La crise économique - chute des cours du café et du thé notamment - les effets conjugués des politiques d'ajustement structurel du FMI et de la Banque Mondiale (chômage massif d'anciens fonctionnaires purgés des administrations) ont créé des tensions sociales alors que les revendications du multipartisme se faisaient plus insistantes devant des régimes qui ne voulaient pas lâcher leur pouvoir.
Dans ce contexte de mutation, plusieurs conflits liés à la nationalité, à l'identité, aux tensions foncières, au retour des réfugiés ou à l'accès au pouvoir ont été instrumentalisés jusqu'à dégénérer en massacres plus ou moins circonscrits ou généralisés. Mais, jusqu'à la première moitié des années 1990, chacun des pays était confronté à ses propres problèmes.
En second lieu, il y a le vide géopolitique et la recherche du leadership régional. Jusqu'au début des années 1990, l'équilibre régional était garanti en quelque sorte par le leadership du président zaïrois Mobutu. Néanmoins, fragilisé de l'intérieur par l'opposition et, de l'extérieur, par une série de sanctions internationales ainsi que par la perte de l'appui dont il jouissait auprès des puissances occidentales, il avait perdu cette autorité. Dès lors, cette place vacante était à occuper. Ainsi, de « nouveaux leaders africains », pour reprendre l'expression du président Bill Clinton, devaient être promus. Ce dernier se référait aux présidents Museveni en Ouganda, Isaias Afeworki en Erythrée et Paul Kagame au Rwanda ainsi qu’au Premier ministre éthiopien, Meles Zenawi. Dans la région des Grands Lacs, deux présidents appartenaient donc à cette catégorie des nouveaux leaders. Engagées dans la guerre en RDC, au sein d'une coalition militaire en appui à une rébellion contre le gouvernement congolais, les armées ougandaises et rwandaises s’opposèrent finalement pour contrôler certains territoires congolais. Cette guerre « fratricide » est la traduction de la lutte pour le leadership régional.
Le troisième enjeu est la recomposition géopolitique. Entre avril et juillet 1994, la guerre civile au Rwanda a dégénéré dans un génocide des Tutsi et Hutu de l'opposition. Un afflux de fugitifs et réfugiés(plus d'un million de personnes) ont trouvé asile dans des camps de réfugiés installés dans le Nord et le Sud Kivu, à l'Est de la RDC et aux portes du Rwanda. Parmi ces fugitifs, se trouvaient des milices et membres de l'ancienne armée, impliqués dans le génocide et constituant une menace pour le Rwanda. Le démantèlement de ces camps et la dispersion de ces populations ont contribué à fragiliser les équilibres et à généraliser l'insécurité à l'Est de la RDC. La guerre civile, puis régionale, qui a éclaté en RDC a opposé une rébellion et l'armée congolaise, toutes deux appuyées par deux coalitions d'armées étrangères. Au total, ce furent jusqu'à une dizaine de pays africains qui se retrouvèrent engagés directement ou indirectement dans ce conflit. Mais, au-delà de cette guerre, une nouvelle géopolitique se dessinait petit à petit à partir du Rwanda où le nouveau pouvoir, constitué d'anciens réfugiés et rebelles venus de l'Ouganda, était anglophone. Par son influence, le Rwanda basculait vers « l'anglophonie ». La guerre à l'Est de la RDC a été alors analysée comme une tentative de faire basculer la RDC francophone vers l'influence anglophone.
Le quatrième et dernier enjeu est économique. Il s'agit du contrôle des ressources naturelles (bois et minerais) de cette partie de la RDC. En effet, des groupes armés, des rébellions et certaines armées étrangères se sont répartis le territoire national de la RDC en y exploitant ses ressources. Dès lors, la guerre pouvait se financer de l'intérieur tout en favorisant une économie de guerre faite de contrebande et de trafic illégal de ces ressources.
Dans les repositionnements stratégiques observés pour le marché de la reconstruction post-conflit, quelles sont les forces en présence ?
Les institutions internationales, en particulier la Banque Mondiale et les agences des Nations Unies, sont les premiers acteurs présents sur ce marché. La première a, par exemple, été l'artisan du nouveau code minier congolais. L'ONU est très présente avec ses « peace keepers » de la Mission des Nations Unies au Congo (MONUC). Les Etats fournisseurs d'officiers de commandement ou de soldats sont sans nul doute assez bien positionnés pour disposer d'informations de premier plan.
Les Etats-Unis sont également très présents à travers leur agence d'aide (USAID) et de nombreuses ONG dont le rôle d'observateur avisé me semble important. De même, l'Union Européenne en tant qu'institution communautaire ou à travers ses membres est très active : la Grande-Bretagne et les Pays-Bas me semblent les plus engagés à l'heure actuelle. L'influence française est plus politique, aussi bien au niveau de l'Union Européenne qu'au niveau du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Ces efforts étatiques privilégient la remise en place de l'Etat, après avoir soutenu le processus électoral : la réforme de l'armée, la consolidation des institutions, etc., tout en veillant sur le volet humanitaire et du respect des droits humains. En puissance africaine, l'Afrique du Sud est bien présente, aussi bien dans la sphère politique et diplomatique qu'économique, à travers des accords bilatéraux sur l'énergie, les communications ou les minerais. Je mentionnerai également l'Angola dont les projets conjoints avec la RDC cherchent à « sécuriser » sa production pétrolière dans l'Enclave de Cabinda – territoire angolais coincé entre l'Atlantique, la RDC et le Congo-Brazzaville.
Dans le domaine économique, la Chine s'est ouvertement positionnée comme acteur majeur de la reconstruction en RDC. Avec un contrat d'exploitation de concessions minières contre une dizaine de milliards de dollars et la réalisation de travaux d'infrastructure, la Chine voudrait lancer des chantiers de grande ampleur. Les pays arabes se sont quant à eux engagés dans le marché de l'hôtellerie de luxe.
Quels sont les pistes et les secteurs à reconstruire ?
En sortie de conflit, si l’on excepte une partie du Nord Kivu où persiste une poche de guerre, la RDC se présente comme un Etat où tout est à faire : des infrastructures de transport et de télécommunications au système administratif à moderniser, en passant par les secteurs touristique et minier, les structures bancaires, les technologies de l'information ou les réformes institutionnelles. La RDC est un pays chantier.
De nombreuses opportunités existent dans tous ces domaines où un tissu de PME recherche des partenariats pour devenir compétitives localement, régionalement ou internationalement.
Que peut-on dire des influences asiatiques – arabes, indiennes, chinoises – et de leurs impacts sur la reconfiguration des pôles émergents dans les Grands Lacs ?
Les influences asiatiques sont la principale caractéristique de l'économie africaine de ces débuts du 21e siècle. La RDC n'échappe pas à cette tendance lourde. Il apparaît en effet que l'économie africaine et ses acteurs ont trouvé en Asie un dynamisme qui semblait leur faire défaut. Dans l'Est de la RDC, par exemple, cette énergie, véhiculée par des grands commerçants du Kivu, a introduit une dynamique qui contraste avec les effets de la guerre encore visibles (camps de populations déplacées par exemple). Ainsi observe-t-on plusieurs phénomènes liés au commerce avec les Asiatiques : le boom immobilier dans les villes de Goma, Bukavu ou Beni, la rénovation du parc automobile avec des véhicules neufs ou d'occasion ayant le volant à droite, l'importance commerciale et financière de la ville de Butembo, etc. L'émergence de Butembo comme nouvel axe est liée aux connexions établies par les commerçants congolais Nande, et leurs partenaires indopakistanais ou chinois, avec le triplet asiatique Dubaï-Mumbai-Ouangzhou. Il s’agit là d’une nouvelle donne économique et commerciale afro-asiatique dont il faut observer attentivement l'évolution dans l’est de la RDC.
Comment l’idée d'une base d'informations et de données présentant la région des Grands Lacs et ses opportunités aux entreprises, aux investisseurs, aux organisations d’Etat, est-elle née ?
Dire qu'il y a du « business » à faire en RDC ne suffit pas. Il faut disposer d’informations pointues, de terrain, actualisées en permanence. Il faut pouvoir bénéficier d’analyses, d’anticipations d’experts qui connaissent parfaitement la région et sont aussi capables de mettre l’information dans une perspective globale. Or, ces informations, qui existent, ne sont regroupées nulle part. Il y a donc un véritable manque pour tous ceux intéressés tant par les investissements, les affaires que la coopération et l’expertise internationale. En accompagnant sur place plusieurs entreprises européennes intéressées par tel ou tel secteur, j’en ai fait l’amère expérience avec tout son corollaire de débauche d’énergie, de perte de temps et, in fine, de découragement.
Concrètement, que trouvera-t-on dans cet observatoire ?
International Focus et Investissement Stratégie Grands Lacs (ISGL) mettent en place un outil dont les résultats seront d'ici peu à la disposition des décideurs des Etats concernés - Burundi, Ouganda, RDC, Rwanda et d'autres comme la Tanzanie ou l'Angola plus tard – mais aussi des entreprises ou de la coopération internationale. Cet observatoire comprendra une base de données constamment actualisées, un recensement des chaînes de valeur, des analyses pointues, des scénarios et des perspectives : autant d’éléments qui accompagneront les processus de décision. L'ambition de cet observatoire des dynamiques de reconstruction est de fédérer, croiser des informations existantes mais éparses et de dégager des indicateurs pour évaluer ce qui a été fait, ce qui reste à faire et surtout les décisions à prendre.
Cyril Musila "
Jean Vinatier
©SERIATIM 2009
Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à : jv3@free.fr
Lien :
http://www.inter-focus.com/ ou http://www.inter-focus.eu
Pour aller plus loin :
Découvrez l’interview de Cyril Musila sur le Rwanda, le 13 Janvier 2009 à 19h30, sur KTO,
canal 73 (Numericable) ou 172 (Canalsat), ou retrouvez-la sur le site Internet
http://www.ktotv.com/, rubrique « Nos Emissions », puis « Eglises du Monde » : www.ktotv.com/cms/emissions/fiche-emissions.html?idP=182_
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