Le Président de la République fera une déclaration aux Français en avril prochain pour annoncer le retour total de la France dans la structure militaire otanienne. Des voix s’élèvent des partis de gauche à l’UMP(Alain Juppé) en passant par le MoDem contre ce choix et certaines d’entre elles exigent un référendum.
Jacques Chirac a initié ce retour français pendant son premier mandat. Le refus catégorique du Président Bill Clinton d’accorder le poste de commandement de l’OTAN à Naples à un officier général français a arrêté l’initiative de l’Elysée.
Nicolas Sarkozy n’a fait aucun mystère pendant la campagne présidentielle de sa volonté de réintégrer l’OTAN, de biffer le choix du Général de Gaulle de 1966. Le Président de la République conditionnait, cependant, sa décision à l’attribution d’un ou deux postes de commandement stratégique. Si l’on ignore encore aujourd’hui qu’elles étaient, alors, les avis de l’administration Bush sur ces demandes, l’entourage du président Obama a indiqué par la voix du vice-président Joe Biden que deux postes pourraient nous revenir à savoir : Premièrement, le commandement stratégique ACT de Norfolk, en Virginie, chargé de la transformation des forces de l’OTAN ; secondement, le commandement de Lisbonne qui abrite la Force de réaction rapide, et enfin une extension des responsabilités opérationnelles au sein de la structure de commandement, peut-être même au SHAPE, serait aussi à l’étude.
Nicolas Sarkozy exigerait, également, d’être placé sur le plan protocolaire immédiatement après le secrétaire-général de l’OTAN ! L’ego toujours : Moi et Moi.
Fin 2008, Edouard Balladur a justifié ce choix politique :
« L'Occident, qui durant des siècles a dominé le monde, est aujourd'hui divisé, menacé par les désordres internationaux et concurrencé par de nouvelles puissances qui n'adhèrent pas à ses valeurs. Affrontant le même danger, l'Europe et les États-Unis doivent ainsi affirmer une plus grande solidarité entre eux en créant une véritable Union occidentale. Il s'agirait de mettre en place un marché commun, de réformer le système monétaire international, de concerter les politiques étrangères et de rééquilibrer le fonctionnement de l'Alliance militaire. Dans cette perspective, l'Europe doit renoncer à une hostilité systématique envers la politique américaine et être plus efficace. Elle deviendrait ainsi un interlocuteur crédible et éviterait la tentation isolationniste des Américains. Une révolution dans les esprits est aussi nécessaire. »¹
Jean-Claude Casanova a redit la même chose dans Slate.fr .²
Cette plaidoirie est claire : la France doit rentrer dans le rang et suivre ce que les Etats-Unis décideront. On nous rappelle sans cesse que les décisions prises au sein de l’Alliance se font à l’unanimité alors qu’en 2003, lors de l’invasion de l’Irak, décidée hors l’aval de l’ONU, l’Allemagne a dit non ! Ce vote a-t-il fait renoncer le secrétariat général de cette organisation ? Non, il a passé outre.
En fait la décision prise par Nicolas Sarkozy correspond à un projet plus large à savoir une union transatlantique qui impliquerait à terme non seulement militairement la mise sous tutelle de toutes les armées des 27 Etats européens mais aussi la subordination de l’Union européenne au droit américain. Militairement et politiquement, l’Europe ne deviendrait plus grand-chose. Bien sûr, l’Elysée avancera l’idée que cette politique se légitime par l’institution à terme d’une véritable défense européenne alors que toute l’Europe de l’Est n’en veut absolument pas !
Comment une alliance, née en 1954 en pleine Guerre Froide dans un monde bipolaire où l’Europe de l’Ouest pouvait être (presque) sûre de la non-indifférence américaine, a-t-elle encore une justification en 2009 ? On cherche vainement une raison qui autoriserait à pérenniser une alliance qui lierait complément l’ensemble européen à la vision stratégique d’un seul Etat. Les propos de l’ancien Premier ministre pompidolien, Edouard Balladur, répètent ce que tous les adversaires du Général de Gaulle disent depuis un demi-siècle ! Ces hommes font le pari que l’Union européenne n’osera jamais se penser en puissance politique c’est-à-dire se doter d’une armée. Bruxelles reste et doit rester un centre de relations commerciales et financières, ni plus, ni moins.
La France, puissance atomique, en se rangeant sous la bannière otanienne fait courir le risque à l’ensemble du continent de ne plus être à même d’être audible envers les autres hyper puissances en devenir : la Chine, l’Inde, le Brésil, la Russie, les Etats de la péninsule arabique. Dans un monde multipolaire, ne conviendrait-il pas que l’Europe tienne son rang hors toute inféodation ? Qui nous dit qu’un jour, notre intérêt ne sera pas d’être à côté de telle ou telle autre puissance continentale? Absolument rien. Le Président Barack Obama jouit d’une grande popularité et d’une compréhension plus souple des problèmes planétaires : pour l’heure, ce ne sont que des conjectures !
Qui nous dit que le rapprochement sino-américain rendu public lors du déplacement d’Hillary Clinton nous favorisera ? Jusqu’à présent la politique chinoise nie toute valeur à l’Union européenne en terme de rapport de force ! Idem pour les Russes qui n’entendent parler que d’égal à égal !
La France qu’on le veuille ou non occupe une place singulière. Nicolas Sarkozy ne s’en n’est-il pas servi pour dynamiser l’Europe pendant sa présidence du conseil de l’Union ? Il est grave que le chef de l’Etat renvoie aux calendes grecques toute défense européenne commune au profit d’intérêts immédiats et de son ego. Les Etats-Unis opéreront, peut-être, sous la présidence de Barack Obama une mutation formidable afin que ceux-ci restent des acteurs majeurs du monde, mais nous, que serons-nous, que deviendrons-nous ?
Nicolas Sarkozy avait toute l’opportunité de mettre son énergie et son envie d’occuper toute la scène pour être l’avocat de la défense indépendante européenne au lieu de quoi, il envoie nos meilleurs régiments combattre vainement dans l’Hindou Kouch, entre l’Afghanistan et le Pakistan, où Alexandre le Grand s’inclina !
Décidément, Nicolas Sarkozy n’a pas retenu que ce César disait, qu’il préférait être le premier dans son village plutôt que le second à Rome. Et Jules César fonda l’empire romain !
Jean Vinatier
©SERIATIM 2009
Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à : jv3@free.fr
Jacques Chirac a initié ce retour français pendant son premier mandat. Le refus catégorique du Président Bill Clinton d’accorder le poste de commandement de l’OTAN à Naples à un officier général français a arrêté l’initiative de l’Elysée.
Nicolas Sarkozy n’a fait aucun mystère pendant la campagne présidentielle de sa volonté de réintégrer l’OTAN, de biffer le choix du Général de Gaulle de 1966. Le Président de la République conditionnait, cependant, sa décision à l’attribution d’un ou deux postes de commandement stratégique. Si l’on ignore encore aujourd’hui qu’elles étaient, alors, les avis de l’administration Bush sur ces demandes, l’entourage du président Obama a indiqué par la voix du vice-président Joe Biden que deux postes pourraient nous revenir à savoir : Premièrement, le commandement stratégique ACT de Norfolk, en Virginie, chargé de la transformation des forces de l’OTAN ; secondement, le commandement de Lisbonne qui abrite la Force de réaction rapide, et enfin une extension des responsabilités opérationnelles au sein de la structure de commandement, peut-être même au SHAPE, serait aussi à l’étude.
Nicolas Sarkozy exigerait, également, d’être placé sur le plan protocolaire immédiatement après le secrétaire-général de l’OTAN ! L’ego toujours : Moi et Moi.
Fin 2008, Edouard Balladur a justifié ce choix politique :
« L'Occident, qui durant des siècles a dominé le monde, est aujourd'hui divisé, menacé par les désordres internationaux et concurrencé par de nouvelles puissances qui n'adhèrent pas à ses valeurs. Affrontant le même danger, l'Europe et les États-Unis doivent ainsi affirmer une plus grande solidarité entre eux en créant une véritable Union occidentale. Il s'agirait de mettre en place un marché commun, de réformer le système monétaire international, de concerter les politiques étrangères et de rééquilibrer le fonctionnement de l'Alliance militaire. Dans cette perspective, l'Europe doit renoncer à une hostilité systématique envers la politique américaine et être plus efficace. Elle deviendrait ainsi un interlocuteur crédible et éviterait la tentation isolationniste des Américains. Une révolution dans les esprits est aussi nécessaire. »¹
Jean-Claude Casanova a redit la même chose dans Slate.fr .²
Cette plaidoirie est claire : la France doit rentrer dans le rang et suivre ce que les Etats-Unis décideront. On nous rappelle sans cesse que les décisions prises au sein de l’Alliance se font à l’unanimité alors qu’en 2003, lors de l’invasion de l’Irak, décidée hors l’aval de l’ONU, l’Allemagne a dit non ! Ce vote a-t-il fait renoncer le secrétariat général de cette organisation ? Non, il a passé outre.
En fait la décision prise par Nicolas Sarkozy correspond à un projet plus large à savoir une union transatlantique qui impliquerait à terme non seulement militairement la mise sous tutelle de toutes les armées des 27 Etats européens mais aussi la subordination de l’Union européenne au droit américain. Militairement et politiquement, l’Europe ne deviendrait plus grand-chose. Bien sûr, l’Elysée avancera l’idée que cette politique se légitime par l’institution à terme d’une véritable défense européenne alors que toute l’Europe de l’Est n’en veut absolument pas !
Comment une alliance, née en 1954 en pleine Guerre Froide dans un monde bipolaire où l’Europe de l’Ouest pouvait être (presque) sûre de la non-indifférence américaine, a-t-elle encore une justification en 2009 ? On cherche vainement une raison qui autoriserait à pérenniser une alliance qui lierait complément l’ensemble européen à la vision stratégique d’un seul Etat. Les propos de l’ancien Premier ministre pompidolien, Edouard Balladur, répètent ce que tous les adversaires du Général de Gaulle disent depuis un demi-siècle ! Ces hommes font le pari que l’Union européenne n’osera jamais se penser en puissance politique c’est-à-dire se doter d’une armée. Bruxelles reste et doit rester un centre de relations commerciales et financières, ni plus, ni moins.
La France, puissance atomique, en se rangeant sous la bannière otanienne fait courir le risque à l’ensemble du continent de ne plus être à même d’être audible envers les autres hyper puissances en devenir : la Chine, l’Inde, le Brésil, la Russie, les Etats de la péninsule arabique. Dans un monde multipolaire, ne conviendrait-il pas que l’Europe tienne son rang hors toute inféodation ? Qui nous dit qu’un jour, notre intérêt ne sera pas d’être à côté de telle ou telle autre puissance continentale? Absolument rien. Le Président Barack Obama jouit d’une grande popularité et d’une compréhension plus souple des problèmes planétaires : pour l’heure, ce ne sont que des conjectures !
Qui nous dit que le rapprochement sino-américain rendu public lors du déplacement d’Hillary Clinton nous favorisera ? Jusqu’à présent la politique chinoise nie toute valeur à l’Union européenne en terme de rapport de force ! Idem pour les Russes qui n’entendent parler que d’égal à égal !
La France qu’on le veuille ou non occupe une place singulière. Nicolas Sarkozy ne s’en n’est-il pas servi pour dynamiser l’Europe pendant sa présidence du conseil de l’Union ? Il est grave que le chef de l’Etat renvoie aux calendes grecques toute défense européenne commune au profit d’intérêts immédiats et de son ego. Les Etats-Unis opéreront, peut-être, sous la présidence de Barack Obama une mutation formidable afin que ceux-ci restent des acteurs majeurs du monde, mais nous, que serons-nous, que deviendrons-nous ?
Nicolas Sarkozy avait toute l’opportunité de mettre son énergie et son envie d’occuper toute la scène pour être l’avocat de la défense indépendante européenne au lieu de quoi, il envoie nos meilleurs régiments combattre vainement dans l’Hindou Kouch, entre l’Afghanistan et le Pakistan, où Alexandre le Grand s’inclina !
Décidément, Nicolas Sarkozy n’a pas retenu que ce César disait, qu’il préférait être le premier dans son village plutôt que le second à Rome. Et Jules César fonda l’empire romain !
Jean Vinatier
©SERIATIM 2009
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Sources:
1-Edouard Balladur in Revue internationale et stratégique, n°72/2008/4 : « Pour une union occidentale entre l’Europe et les Etats-Unis »
2-http://www.slate.fr/story/otan-fausse-et-vaine-querelle
1-Edouard Balladur in Revue internationale et stratégique, n°72/2008/4 : « Pour une union occidentale entre l’Europe et les Etats-Unis »
2-http://www.slate.fr/story/otan-fausse-et-vaine-querelle
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