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mardi 22 décembre 2009

Népal : « un autre Afghanistan » ?- N°599- 3e année

La grève générale lancée sur l’initiative du parti communiste maoïste népalais conduit par l’ex-Premier ministre Prachanda (août 2008-mai 2009) paralyse le pays tout entier. Le 9 novembre dernier, les maoïstes ont proclamé l’autonomie de l’Etat du Kirat. Au même moment, l’ancien ministre des Finances, Baburam Bhattarai, a prévenu que son parti avait les moyens de bouleverser le Népal au point d’en faire « un second Afghanistan » !
Pendant ce temps, l’actuel Premier ministre et ancien secrétaire général du parti communiste marxiste-léniniste, Madhav Kiman Nepal, débute un voyage officiel en Chine. Depuis New Delhi, on suit avec la plus grande attention ce déplacement politique.
Après l’abolition de la monarchie au printemps 2008, le Népal est en proie à un désordre intérieur qui ne cesse pas de grandir. Le Président népalais, Ram Baram Yadav, le gouvernement et le parlement sont devant une crise intérieure qui leur échappe depuis que les maoïstes ont quitté avec fracas le pouvoir en mai 2009. Les disputes quotidiennes auxquelles assiste la population dans un climat économique tendu pourraient devenir explosives dans les prochains mois.
La situation présente est, en fait, l’aboutissement de toutes les tractations entreprises par les différents acteurs politiques népalais qui ont sollicité la Chine et l’Inde au moment des derniers mois du règne de Gyanendra. Les maoïstes ainsi que le parti du Congrès ont été soutenus par le gouvernement indien jusqu’alors soutien fidèle de la dynastie népalaise. Pourquoi ce revirement ? Le roi Gyanendra, pour mieux lutter contre la guérilla maoïste avait signé avec la Chine un contrat d’armement. Cet accord marquait la défiance habituelle chinoise pour tous les mouvements qui se réclament de l’idéologie du Président Mao Tse-Toung.
La République proclamée, cependant, Pékin a regardé de plus en plus favorablement la place prise par le parti maoïste dans sa nouvelle politique de voisinage avec les Etats himalayens (Népal, Bhoutan) jusqu’à présent placés sous l’influence directe de l’Inde.
Pourquoi ? La Chine observe bien les connections entre le parti maoïste et les naxalites (communistes indiens différents des communistes marxistes-léninistes indiens comme au Népal) et de ces derniers avec les Tamouls, présents dans le Sud-Est de l’Inde et
au Sri-Lanka jusqu’à leur écrasement par l’actuel Président, Mahinda Rajapakse. C’est donc toute une ligne « contestatrice » qui traverse une large partie de l’Est Indien et, surtout, le fameux Corridor rouge connu sous le nom de Ruhr en raison de l’implantation actuelle et à venir de complexes industriels et technologiques de première importance pour New Delhi.
De son côté, l’Inde essaie de revenir dans le jeu népalais sans le moindre succès. En toute logique l’actuel gouvernement de Katmandou, parce qu’opposé aux maoïstes de Prachanda, devrait accueillir les médiations indiennes mais, les ministres népalais s’atermoient : d’un côté, ils approuvent la construction d’un nouvel aéroport par les Indiens, de l’autre, ils se réjouissent des projets chinois de constructions routières qui désenclaveraient le pays le rendant moins dépendant des produits indiens et de la mise en valeur de leur eau. New Delhi n’a, en réalité, qu’un seul allié dans le pays, l’armée et son commandant en chef, Rookmangud Katawol, bête noire de Prachanda et..dit-on de Pékin !
A une situation intérieure délicate et face aux enjeux géostratégiques de l’Inde et de la Chine, s’ajoutent pour compliquer le tout, la question des réfugiés népalais au
Bhoutan. Ces derniers chassés par le pouvoir royal errent entre ce pays et le Népal dans l’ancien royaume du Sikkim, annexé par New Delhi en 1975 et dont la frontière borde la région autonome du Tibet ! Ces réfugiés népalais sont encadrés par des communistes opposés au roi du Bhoutan sous l’œil bienveillant chinois.
Que penser du propos du maoïste Baburam Bhattarai de faire du Népal «
un second Afghanistan » ? Les maoïstes pourraient-ils être les nouveaux « talibans » himalayens ? En fait, les rivalités intestines népalaises attisent les concurrences sino-indiennes qui courrent ainsi depuis le Cachemire jusqu’au Bhoutan sur fond de rivalités frontalières héritées de traités rédigés par les Anglais au XIXe siècle. La Chine a, pour l’heure, les cartes maîtresses en main et attend visiblement une réponse indienne : un sacré défi !
Le Népal est-il encore maître de son avenir ?



Jean Vinatier

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In Seriatim :

Voir in Seriatim Népal: N° 54 (16/10/2007), 119 (17/01/2008, 183 (15/04/2008)
Voir in Seriatim Inde : N° 31 (13/09/2007), 48 (8/10/2007), 98 (17/12/2007), 347 (1/12/2008) et plus particulièrement
N°546 (9/10/2009) « Sécuriser sa Ruhr dans le corridor rouge »
Voir in Seriatim Bhoutan : N° 119 (17/01/2008), 327 (6/11/2008)
Voir in Seriatim Sri Lanka : N°457 (4/05/2009)

Sources :

Dhruba Adhikary : “A red-carpet welcome for Nepal”
http://www.atimes.com/atimes/South_Asia/KL22Df01.html

Dhruba Adhikary : “Political impasse takes Nepal to brink”
http://www.atimes.com/atimes/South_Asia/KK18Df03.html

Peter Lee : « Sino-Indian rivalry fuels Nepal's turmoil »
http://www.atimes.com/atimes/South_Asia/KK14Df01.html

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