Lors de la confrontation qui opposa Marine Le Pen avec Jean-Luc Mélenchon, elle lui reprocha d’être un leurre : se doutait-elle qu’elle caractérisait, sans doute, l’actuel moment politique qui deviendra d’ici peu officiellement la campagne présidentielle ? Leurre semble être le maître mot de tous les leaders, c’est leur drone, tant ils s’attachent à nous conter une histoire qui évolue au gré des jours et des événements. Leurre est partout, autant chez Nicolas Sarkozy qui recycle sans vergogne ses arguments de 2007, un François Hollande qui dit tout et son contraire selon l’endroit où il se situe, un Jean-Luc Mélenchon qui tout tribun hors pair qu’il est a avoué devant la présidente du FN qu’il appellerait à voter pour le candidat socialiste alors qu’il le ridiculise chaque matin, un François Bayrou centriste errant s’entrechoquant à droite, à gauche, une Marine Le Pen qui s’imagine Jeanne d’Arc et tente de fédérer tous les courroux des Français découragés, amers et se revendique comme les autres formations d’un gaullisme, d’un socialisme: mais qui va-t-elle bouter ? J’oubliais Eva Joly, faute d’exister elle n’est pas un leurre mais une bise !
Jacques Attali, je crois, avait fait une chronique il y a quelque temps où il prédisait que la présidentielle de 2012 déboucherait sur l’élection d’un Président par défaut. Peut-on lui donner tort ? La démocratie française telle qu’elle s’est constituée en 1959 ne parvient plus à renouveler par le jeu de l’élection les partis politiques. La droite et la gauche, acteurs consentants au service d’une dictature ultra-libérale, conscientes malgré tout de leur fragilité commune, essaient leurs dernières cartes en diabolisant telle ou telle formation politique mais en veillant à y chasser sans vergogne devenant donc des leurres pour des électorats apeurés. C’est un cercle vicieux, pervers où les chefs de droite et de gauche se targuent d’agir au nom d’une démocratie représentative tout en la captant pour livrer soumis une nation devant des lobbies financiers, la bureaucratie bruxelloise et ainsi de suite.
La vie politique française complétement « désidéologisée » qui permettait hier de dépasser le seul cadre étroit de la cité faisant des Français une nation participante à l’histoire continue de notre pays, laisse la place en toute logique à des partis qui par des disputes gestuelles maintiennent la fiction de la démocratie ou la réduisent à des faits divers. Ils n’osent la biffer parce qu’elle est nécessaire pour légitimer et légaliser l’application d’une pensée uniquepour la toute-puissance, notamment, des potentats financiers . Dans un pays comme la France née d’une idée qui a fait naître un Etat lequel a donné naissance à la Nation, il est presque incroyable que les Français ne se montrent pas davantage plus rebelles, révoltés (on n’ose écrire révolutionnaires) devant autant d’attaques contre le socle même de leur Histoire.
Mais dans cette pré-campagne présidentielle tout semble doux à l’instar de ce temps quasi printanier, les mots et les formules des leaders politiques vont et viennent, la cité poursuit son bonhomme de chemin nullement affectée par les leurres à croire que ceux-ci suffisent à ligoter une nation qui semble avoir été tétanisé par l’usage fait du référendum de 2005.
Et pourtant ne risque-t-on pas d’avoir : un Président par défaut en mai, une Chambre introuvable en juin, un Peuple furieux en septembre ?
Jean Vinatier
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