Nicolas Roinsard, sociologue
fait la critique pour La Vie des idées de l’ouvrage d’André Gueslin qui étudie
depuis longtemps « les gens pauvres et pauvres gens » : « D’ailleurs et de nulle
part. Mendiants, vagabonds, clochards, SDF en France depuis le Moyen Âge ».
C’est un sujet délicat
et riche avec lequel il n’est guère aisé de cheminer tant le « monde de l’errance »
est singulier parce que « c’est écrire « une histoire d’hommes sans voix à
travers les traces qu’ils laissent et les représentations qu’en ont les nantis
»
«[….] Du statut au stigmate
Au Moyen Âge, les vagabonds mendiants sont intégrés pour des raisons
théologiques. La pauvreté se définit sous la forme d’un rapport social entre
dominés et dominants, sur fond de chrétienté : les premiers achètent leur salut
par leur indigence, les seconds par la charité. De ce fait, le pauvre dispose
d’un véritable statut social : « Pour l’homme ordinaire du Moyen Âge, le pauvre
est perçu en quelque sorte comme une théophanie : c’est le Christ de retour sur
terre. À défaut il est un intercesseur avec Dieu » (p. 22). Une transition
s’opère à la fin du Moyen Âge : l’accroissement de la pauvreté errante, déterminé
en grande partie par des crises économiques, des épidémies et des accidents
climatiques, a pour effet de modifier les représentations de la pauvreté. Le
vagabondage, qui concerne au XVe siècle entre 20 et 25% de la population
française (p. 28), est de moins en moins toléré pour la charge économique qu’il
suppose, et le sentiment d’insécurité qu’il véhicule (délinquance,
criminalité). Ces changements de représentations à l’endroit des vagabonds et
autres mendiants valides — rapidement assimilés à de « mauvais pauvres » dans
la société capitaliste naissante réclamant toujours plus de main d’œuvre —
annoncent le temps de la répression et de la diabolisation. Au mitan du XVIe
siècle s’affirme ainsi, dans le traitement social de la pauvreté, une distinction
entre la potence et la pitié [3], entre la pauvreté méritée et la pauvreté
méritante, qui opérera tout au long des siècles suivants au travers d’un
processus d’étiquetage orchestré par les pouvoirs publics et autres
entrepreneurs de morale [4]. Au cœur de ce système à la fois répressif et
assistanciel, deux dispositifs marqueront les XVIIe et XVIIIe siècles :
l’Hôpital général créé en 1656, et les dépôts de mendicité créés en 1764.
Poursuivant un même objectif de rééducation par le travail, ces deux tentatives
de normalisation du monde de l’errance, comme bien d’autres (déportation vers
les colonies, peine des galères), se solderont par un échec. »
La suite ci-dessous :
http://www.laviedesidees.fr/L-errance-au-ras-des-siecles.html
André Gueslin, D’ailleurs
et de nulle part. Mendiants, vagabonds, clochards, SDF en France depuis le
Moyen Âge, Paris, Fayard, 2013, 536 p., 26 €.
Jean Vinatier
SERIATIM 2013
Internautes : Afrique du Sud, Albanie, Algérie, Angola, Arabie
Saoudite, Argentine, Arménie, Australie, Bahamas, Bangladesh, Biélorussie,
Bénin, Bolivie, Bosnie Herzégovine, Brésil, Burkina Faso, Cambodge, Cameroun,
Canada, Chili, Chine (+Hongkong & Macao), Chypre, Colombie, Congo-Kinshasa,
Corée du Sud, Costa-Rica, Côte d’Ivoire, Djibouti, EAU, Egypte, Etats-Unis (30
Etats & Puerto Rico), Equateur, Ethiopie, Ghana, Gabon, Gambie, Géorgie,
Guatemala, Guinée, Guinée, Haïti, Honduras, Inde, Indonésie, Irak, Iran,
Islande, Israël, Jamaïque, Jordanie, Kazakhstan, Kenya, Laos, Liban, Libye,
Liechtenstein, Macédoine, Madagascar, Malaisie, Malawi, Mali, Maurice, Maroc,
Mauritanie, Mexique, Moldavie, Monaco, Népal, Niger, Nigeria, Norvège, Nouvelle
Zélande, Oman, Ouzbékistan, Palestine, Pakistan, Pérou, Philippines, Qatar,
République Centrafricaine, République Dominicaine, Russie, Rwanda, San
Salvador, Saint-Marin, Sénégal, Serbie, Singapour, Slovénie, Somalie, Suisse,
Syrie, Taiwan, Thaïlande, Togo, Tunisie, Turquie, Union européenne (27 dont
France + DOM-TOM, Nouvelle-Calédonie, Polynésie, Saint-Pierre–et-Miquelon),
Ukraine, Uruguay, Vatican, Venezuela, Vietnam, Yémen
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