« Analyste-rédactrice à
la Documentation française (revue Questions internationales et site P@ges Europe),
Co-rédactrice en chef du site Regard sur
l’Est, chargée de cours à l’INALCO et membre du CREE (Centre de
recherches Europes-Eurasie, INALCO). »
« Voici une remarquable lecture géopolitique des jeux et enjeux autour
des gazoducs à destination de l’Union européenne. C. Bayou – qui suit le
dossier depuis longtemps – précise et actualise notre compréhension de ce sujet
déterminant. Un texte de référence, à la fois documenté, lucide et clairement
rédigé. Illustré d’une carte.
DEPUIS QUELQUES ANNEES, le projet de Corridor Sud et ses concurrents russes
focalisent l’attention d’acteurs qui envisagent de faire transiter du gaz par
la région de la mer Noire et l’Europe du Sud-Est, puis de l’acheminer vers les
marchés d’Europe de l’Ouest [1].
Quelle que soit la voie envisagée, via la Turquie ou via la mer
Noire, celle-ci atteste la montée en puissance de cette zone en passe de
devenir un nouveau pont gazier entre producteurs (russe, azerbaïdjanais,
turkmène, iranien, irakien…) et consommateurs européens. Pour les pays d’Europe
du Sud-Est, l’enjeu est d’importance, chacun ayant intérêt à voir passer le
futur tube sur son territoire. La situation de la plupart de ces États en
matière d’approvisionnement énergétique est en effet loin d’être confortable,
ce qu’illustrent par exemple les protestations répétées des populations
(Albanie, Bulgarie, etc.), mécontentes du montant de leur facture
énergétique ; mais également la crise du gaz russo-ukrainienne de janvier
2009, lorsque la Russie a coupé pendant quelques jours les livraisons
transitant par le territoire ukrainien, privant momentanément de gaz quelques
pays, parmi lesquels la Serbie, la Croatie, la Macédoine, la Bulgarie et la
Grèce. Mais le passage d’un tube sur un territoire, outre qu’il assure au pays
concerné un approvisionnement a priori stable et régulier, comporte
aussi une dimension géopolitique : il fournit au pays concerné des
recettes de transit et lui confère un pouvoir de négociation certain à l’égard
de ses voisins, surtout si des branches partant de ce gazoduc sont envisagées.
C’est ainsi que l’annonce, le 1er décembre 2014, par le Président russe Vladimir
Poutine de l’abandon du projet South Stream au profit d’un possible Turkish Stream,
a fait l’effet d’un véritable coup de théâtre, mais pas seulement pour l’Union européenne [2].
Les pays d’Europe du Sud-Est ont immédiatement compris la portée de ce
changement. Leur réaction depuis met en lumière la posture de chacun et les
rivalités à l’œuvre dans la région pour la récupération du gaz. De fait, après
avoir été longtemps spectateurs de la relation gazière entre Union européenne
(UE) et Russie, la plupart des États de la région tentent désormais de devenir
de véritables acteurs des recompositions en cours. Avec l’abandon du South
Stream, certains d’entre eux semblent avoir perdu une bataille, tandis que
d’autres, marginalisés jusqu’alors, se trouvent brutalement projetés sur le
terrain du transit. Tous tentent de tirer leur épingle de ce jeu.
[….]
La suite ci-dessous :
Vidéo d’Alexis-Gilles Troude : Actualité
balkanique
Actualité balkanique, par Alexis Troude par realpolitiktv
Jean Vinatier
SERIATIM 2015
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