« La
diplomatie religieuse de l’Arabie saoudite est une mécanique soutenue par un
système politique ; mue par un groupe religieux à ambition planétaire, les
Oulémas ; et une idéologie. Jusqu’à ce jour, elle a très peu été étudiée
comme système. P. Conesa jette un pavé dans la mare avec un nouvel ouvrage. Il
répond aux questions de Pierre Verluise.
Pierre Conesa
vient de publier, Dr Saoud et Mr. Djihad. La diplomatie religieuse de
l’Arabie saoudite, préface d’Hubert Védrine, Coll. Le monde comme il va,
éd. Robert Laffont, 2016.
Pierre Verluise (P. V.) : Pourquoi le prosélytisme est-il dans l’ADN du régime saoudien ?
Pierre Conesa (P. C.) : Le triomphe de la famille des Al Saoud pour unifier la péninsule n’a été possible qu’avec l’appui de la famille des Al Cheikh, (celle de Abd al Wahhab). Celle-ci a légitimé la guerre des Saoud contre l’Empire Ottoman puis contre les autres tribus du Royaume en proclamant le djihad. Même la prise des Lieux Saints contre le Chérif de la Mecque, pourtant descendant du Prophète, a été ainsi justifiée. Le régime saoudien établi sur la double légitimité tribale et religieuse, est une vaste entreprise familiale à deux têtes aux intérêts intimement liés.
Les oulémas wahhabites considèrent, dés la naissance
du royaume, que la mission même du nouveau pouvoir est de diffuser leur version
de l’islam partout dans le monde. C’est une décision politique d’Abd al-Aziz
Ibn Saoud qui supprime l’usage du terme « wahhabisme », pour le
remplacer dans la terminologie officielle par celui de « salafisme ».
Dès 1956, le prince et futur roi Faysal déclare officiellement que
« l’islam [dans sa variable wahhabite exclusive évidemment] doit être au
centre de la politique étrangère du Royaume ». Cinquante ans plus tard, ce
principe est confirmé par l’article 23 de la Loi fondamentale promulguée en
1992 qui maintient le principe de la da’awa, c’est-à-dire l’obligation de
propager l’islam : « L’État protège la foi islamique et applique la
Charia islamique. L’État impose le bien et combat le mal ; il accomplit
les devoirs auxquels l’appelle l’islam. » Et l’article 34 précise
que : « La défense de la religion islamique, de la société et de la
patrie est le devoir de chaque citoyen. »
La
suite ci-dessous :
Jean Vinatier
Seriatim 2016
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