Il s’est, sans doute, passé quelque chose d’assez nouveau dans la
pratique la Ve République qui vit, en quelque sorte, la « déposition du
Président de la République » par son Premier ministre, ce dernier,
ensuite, quittant la place pour se lancer dans cette campagne des primaires de
la rue de Solferino. Ce geste étant, sans doute, la conséquence naturelle du « Tu
quoque mi fili»
La disposition du théâtre politique n’est plus : François
Hollande, Nicolas Sarkozy, deux chefs de l’Etat happés par la boule du jeu de
quilles (ce qui n’est pas rien), la mise à l’écart d’Alain Juppé, ancien
Premier ministre chiraquien et ministre sarkoziste. Certains ont tout de suite
évoqués une forme de « Brexit ». L’émergence de François Fillon
voulue par un électorat bien-pensant et âgé jugeant que leurs écus auraient
encore de l’espérance avec un homme leur promettant la sévérité pour les
sans-dents et l’opulence pour les gens d’au-dessus n’est pas en soi un acte
révolutionnaire mais un placement strictement convenu. Pourtant, la cinglante
défaite de Matteo Renzi qui appliquait une politique « thatchérienne »
dont François Fillon se veut le chantre devrait les faire réfléchir.
De l’autre côté de la scène, la gauche s’apprête à vivre sa primaire où
deux mois durant ils offriront débats et disputes au terme duquel d’ailleurs
Manuel Valls pourrait être le grand battu si l’on tient compte de l’ambiance
générale qui tend à escamoter de son socle ceux qui prétendent avoir, de droit,
la première place.
Le terme du quinquennat de François Hollande s’achève dans la
déconfiture et la mise au pas des citoyens et des magistrats : la création
d’un méga fichier signé par Bernard Cazeneuve devenu Premier ministre, et la
Cour de cassation placée sous l’autorité directe du gouvernement. Les premiers
magistrats s’en alarment à juste titre sans y pouvoir grand-chose. Ces deux
faits qui ne soulèvent aucune protestation de la Ligue des Droits de l’Homme et
autres ONG font de la France un Etat le plus policier d’Europe et ce ne sont
pas les médias maintenus en vie par subventions interposées qui brandiront le
moindre étendard.
Il règne donc en France une toute petite cour d’une ancienne
puissance souveraine qui croit dénicher
une formule thatchérienne dont les anglais ne veulent plus et les américains moins
encore ainsi que la moitié de l’Europe continentale alors même que l’autre côté
du Channel et de l’Atlantique, Londres et Washington mettent un terme à une
mondialisation qu’ils ne pouvaient tenir d’un bout à l’autre pour se recentrer
sur eux-mêmes et retrouver toute leur puissance respective. Ainsi quand les
anglo-américains vont de l’avant, la France fait un pas en arrière en criant en
avant : cet attelage rompra.
Dans le tragique de la politique française qui ne sait plus penser pour
ce qu’elle est, il y a cette idée qu’en complaisant aux idéaux berlinois, le
pays aurait un peu de dessert. Mais l’Allemagne d’Angela Merkel qui sue l’ennui,
ne voit que midi à sa porte et répugnera toujours à être à la tête d’une Europe
puissance politique. La chancelière est une caissière. Le déséquilibre patent
entre Berlin et Paris ne se résoudra pas par l’adoption d’un modèle économique
qui met les gens à et dans la rue. A la vérité, la France ne voulant plus de la
politique, estime que la seule l’adhésion à une doxa ultra-libérale serait le
sésame. Or, la France n’a été puissante économiquement que dans le moment où sa
pensée politique était au firmament.
Jean Vinatier
Seriatim 2016
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