« Nicolas Sarkozy
avait placé en 2007 l’identité nationale au cœur de sa campagne. Mais l’idée est
apparue beaucoup plus tôt dans le discours politique : dans les années
1980, le gouvernement socialiste en avait fait le pivot de sa politique
culturelle. »
Pour La vie des idées recension de l’ouvrage de Vincent Martigny, Dire
la France. Culture(s) et identités nationales, 1981-1995, Paris, Presses de
Sciences-Po, 2016, 376 p., 27 € par Anne-Marie Thiesse
« La notion d’
« identité nationale » est omniprésente dans les discours médiatiques
et politiques de la France actuelle. Mais quand ce syntagme s’y est-il
introduit ? Et sur quel bord du spectre politique ? La réponse paraît
assez simple : venue de l’extrême-droite, l’expression « identité
nationale » aurait fait une percée fulgurante lors de la campagne
présidentielle de 2007, notamment dans les discours de Nicolas Sarkozy. Erreur
totale : le premier programme de campagne présidentielle qui ait employé
l’expression date de 1981, et le candidat était François Mitterrand. Cette
genèse socialiste de l’identité nationale et son glissement progressif vers
l’autre pôle idéologique, Vincent Martigny les retrace dans une magistrale
étude de la vie politique française du 20e siècle finissant. Axe principal de
son étude : la culture, proposée désormais comme enjeu majeur du
développement de la nation, sur la scène mondiale et en interne.
L’identité nationale contre
l’impérialisme culturel américain
Comme toutes les expressions à
succès, qui en viennent à saturer l’espace public, l’identité nationale a été
investie, selon ses promoteurs successifs et selon les contextes, de sens
variés, et même parfaitement antagonistes. Le lancement de cette thématique
autour du candidat Mitterrand se fait bien dans le cadre d’un combat de gauche,
qui rassemble les revendications post-68 du droit à la différence culturelle
(notamment droits des cultures régionales et minoritaires) et l’affirmation
d’une urgence à défendre la culture nationale contre la puissance uniformisante
et débilitante de l’impérialisme culturel américain. Jack Lang, premier
ministre de la Culture du septennat, porte avec fougue le double étendard. Les
droits des cultures régionales et minoritaires, à vrai dire, donneront lieu à
des déclarations d’intention (rapport Giordan) et à des actions symboliques,
mais ils ne seront guère traduits en mesures politiques.
La suite ci-dessous :
Jean Vinatier
Seriatim 2017
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