L’historien Jean-Jacques Becker dans la
préface du livre de Nuno Severiano Teixeira « L’entrée du
Portugal dans la Grande Guerre : objectifs nationaux et stratégies politiques » note qu’
: « il serait d’ailleurs cruel pour les historiens français d’établir
la listes des ouvrages consacrés à la Grande Guerre, de qualité par ailleurs,
où le Portugal n’est même pas mentionné, où est totalement passé sous silence
que nombre de soldats portugais y ont perdu la vie »1
Le Portugal de l’été 1914
est une dans une situation complexe. Le renversement du Roi Manuel II le 5
octobre 1910, pendant l’escale officielle du Président du Brésil le maréchal
Hermes Da Fonseca qui assista à la révolution depuis le cuirassé São Paulo confèrera à cette révolution un
caractère singulier..
Sur le plan
intérieur : la Première République (1910-1926) entamera une réforme
radicale des institutions politiques et sociales du pays, balayant tout ce qui
pouvait rappeler la royauté, décidera de la séparation de l’Eglise et de
l’Etat. Ces réformes menées au pas de course se firent alors que l’instabilité ministérielle et les rivalités
entre les partis fragilisaient la jeune république. Il fut même question dès
1912 de libérer tous les royalistes.
Sur le plan ibérique :
la Première République eut à gérer l’hostilité grandissante de l’Espagne
d’Alphonse XIII qui voyait d’un mauvais
œil, ce Portugal nouveau capable de souffler
sur les braises de la contestation sociale, alors, très violentes.
A l’extérieur, le Portugal
républicain, comme le Portugal de Charles Ier, se heurtera à la question des
possessions lusitaniennes d’Afrique (Mozambique et Angola) lorgnées par
l’Allemagne de Guillaume II et entretenu dans cette espérance par les ententes
secrètes (1912-1913) avec le Royaume-Uni. Cette attitude anglaise choqua les
Portugais liés à une très vielle alliance avec Londres datant des traités de
1373, 1386 et surtout celui dit de Methuen en 1703. Ce dernier traité placera
Lisbonne sous une sorte de protectorat commercial et colonial assurant à
l’Angleterre en Inde et face à la Chine (Macao) des bases navales importantes.
Le Portugal de l’été 1914
est donc une république fragile, politiquement, socialement, reconnue du bout
des lèvres par les Etats européens monarchiques, en quête d’une grande cause
fédératrice telle la guerre. Le parti démocrate lisboète s’attacha à multiplier
les tracas administratifs aux navires allemands dans ses eaux maritimes avec
l’accord de Londres, obligeant Berlin à entrer en guerre en 1916.
Le Portugal mobilisera
200 000 hommes, ses soldats s’illustreront à la bataille de la Lys en avril
19182. Les séquelles de la Première guerre
mondiale : pertes humaines, l’incapacité à ne rien d’obtenir lors des
traités de paix, auront des répercussions dramatiques. En 1926 les militaires
portugais balaieront la république parlementaire, institueront une Seconde
République d’où émergera « l’estado novo » d’Antonio de Oliveira Salazar
et qui durera jusqu’à la Révolution des Œillets de 1974.
On comprendra que le Portugal
marqué par la déception des traités de Versailles, optera pour une parfaite
neutralité lors de la Seconde Guerre mondiale.
Notes:
1-Le Portugal et la Première
Guerre mondiale : la problématique de l’entrée en guerre :
2-« Soldado Milhões », Le film sur le
grand héros portugais de la première guerre mondiale
Sources :
L'engagement portugais dans la Première Guerre
mondiale vu de France par Viviane Ramond
Le Portugal dans la 1ère Guerre
mondiale : introduction par Emmanuelle Guerreiro, Marianne Delacourt
Centenaire de la bataille de la
Lys 9 avril 1918 :
Jean Vinatier
Seriatim 2018
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