« De hauts responsables de l’administration ont confié au New York
Times qu’à plusieurs reprises en 2018 Donald Trump a dit en privé qu’il
souhaitait se retirer du traité de l’Organisation de l’Atlantique Nord
(OTAN) » (1) – déclarations qui, réitérées avec insistance, ont provoqué
l’inquiétude de ceux qui, aux Etats-Unis, soutiennent l’Alliance quand, du côté
européen, les budgets que les alliés consacrent à l’Organisation sont loin
d’atteindre l’objectif fixé par le président américain. L’idée n’est pas neuve,
le candidat Trump l’avait longuement exposée en avril 2016 lors de son discours
sur la politique étrangère qu’il souhaitait conduire : « Nos alliés
doivent contribuer au coût financier, politique et humain qu’exige notre énorme
fardeau sécuritaire. Mais nombre d’entre eux ne le font tout simplement pas.
Ils voient les Etats-Unis comme faibles et complaisants et ne ressentent aucune
obligation à honorer les accords qu’ils ont passés avec nous » (2).
Plus précisément : « A l’OTAN par exemple, quatre seulement des
vingt-huit membres, outre l’Amérique, dépensent le minimum requis de 2% de leur
PIB pour la défense. Nous avons dépensé au fil du temps des milliards de
dollars – en avions, missiles, vaisseaux, équipements – configurant nos forces
armées afin qu’elles assurent une défense solide pour l’Europe et pour l’Asie.
Les pays que nous défendons doivent payer pour le coût de leur défense – et
s’il n’en est pas ainsi les Etats-Unis doivent être préparés à les laisser
assumer seuls leur défense ».
En Europe, depuis, on s’est efforcé de faire le dos rond, même après la
déclaration remarquée de la chancelière Angela Merkel, en mai 2018, à
l’occasion d’une rencontre avec Emmanuel Macron : « Le temps où l’on
pouvait compter tout simplement sur les Etats-Unis pour nous protéger est
révolu », avait-elle dit. « L’Europe doit prendre elle-même son
destin en main, c’est notre défi pour l’avenir » (3). De même a-t-elle
soutenu devant le Parlement européen à Strasbourg, en novembre dernier, la
création d’une « véritable armée européenne ». Non pas d’une armée
qui permettrait « de se protéger de la Chine, de la Russie et même des
Etats-Unis d’Amérique » comme proposé par le président français, qui avait
provoqué une tension avec Donald Trump, lequel avait jugé ces propos « très
insultants ». Mais en affirmant : « Ce n’est pas une armée
contre l’OTAN (…). Cela peut être un bon complément de l’OTAN, personne ne veut
remettre en question les relations classiques » (4). Sa déclaration a pu
être entendue, faute d’éléments concrets, non comme un engagement, mais comme
un soutien verbal au projet que défend son partenaire français en vue des
élections européennes de mai 2019 : une « Europe souveraine »,
autour d’un sujet, la défense européenne, en échec depuis le rejet par la France,
en 1954, d’une « communauté européenne de défense ».
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Jean Vinatier
Seriatim 2019