Les ondes de choc de l’affaire
Georges Floyd ont bondi, notamment, en France en prenant les habits d’Amada
Traoré s’accompagnant d’une campagne de déboulonnages, de souillures de
statues, de propositions de changement des noms de rue au nom de notre histoire
d’esclavagiste, de colonisateur, de blanc. Certains universitaires américains
s’attaquent maintenant à la musique classique car elle serait le privilège des
blancs et des asiatiques…..
Ces événements surviennent lors
d’une campagne présidentielle américaine dont la virulence dépassera celle de
2016 : les démocrates (et quelques républicains) déjà opposés à Donald
Trump savent qu’une réélection le 3 novembre sonneraient le glas d’une présidence
américaine beaucoup plus mondialiste que celle en cours. Les enjeux financiers,
économiques, sociaux, démocratiques sont considérables. Cette puissance
d’opposition à Donald Trump s’appuie notamment sur un levier qu’est le racisme
américain consubstantiel à la naissance des Etats-Unis. Ce levier
pro-afro-américain n’est pas isolé puisque toutes les minorités qualifiées de
victimes ou d’oppressées tendant à composer une armée hétéroclite mais mue par ce
qu’elles prétendent être. Derrière toutes ces revendications, discours et
actions, agissent des fondations, des personnes richissimes les seuls à
financer et à assurer une publicité, médiatique, sur les réseaux sociaux.
Quand bien même Donald Trump
obtiendrait-il un second mandat, les combats pour les diversités ne
disparaitraient pas pour autant. En effet, la faute originelle américaine aurait
été triple : avoir été des colons, avoir été des esclavagistes puis des
ségrégationnistes, avoir mis dans des réserves les Indiens, populations d’origine.
On remarquera que personne ne se choque du terme « réserve » qui est
à bien des égards aussi pire que la ségrégation et que les Indiens restent en
dehors des « Blacks lives matter ». On notera aussi que les
afro-américains pourraient être vus par les Indiens comme des colons
(contraints ou involontaires) au même titre que les Européens du Mayflower !
On soulignera aussi que
décrochage de portraits de confédérés présents au Capitole ne gênait aucun démocrate jusqu’à ce jour et
que Barack Obama pendant ses deux mandats n’avait guère paru être sensible à
une purification statuaire….Bref, cette campagne présidentielle américaine
présente tous les aspects d’une offensive générale de grande ampleur englobant
autant les Etats-Unis que l’Europe pour abolir, effacer, déconstruire tous les
symboles des Histoires des susdits pays. Est-ce l’homme blanc qui est visé ?
Serait-il question de préparer à un nouveau monde Atlantique dans lequel les
nations, une et indivisibles, s’effaceraient au profit des communautarismes,
des ethnies, des minorités toutes victimes et toutes bien séparées, divisées ?
Il y a chez certains blancs américains le dédain de ce qu’ils sont. On pense à
cette femme issue de la couche aisée qui a théorisé autour du « privilège
blanc » dans une sorte de trame rédemptrice caractéristique de certaines sectes
protestantes. On a depuis longtemps la théorie des genres qui sévit désormais
jusqu’en Europe, de même l’implosion du modèle de couple homme/femme. Plus
largement, certains esprits américains veulent recréer une autre histoire, d’autres
mémoires via un bain purificateur. Les Etats-Unis sont vues comme une Terre
promise mais est-elle si juste, si bonne, si pure ? Le terreau protestant,
les courants messianiques que les différentes monarchies européennes avaient
pris soin d’expédier par-delà les mers aux XVI et XVIIe siècles peinant déjà à
émerger des guerres de religion qui durèrent, si l’on part des bogomiles
(cathares) et des hussites jusqu’à l’édit de Fontainebleau de 1683 pas loin de
trois siècles, ont sédimenté jusqu’à l’avènement à la moitié du XXe siècle des
Etats-Unis au rang de première ou hyperpuissance puissance mondiale. Depuis
1945 les Etats-Unis ne cessèrent pas d’affronter des conflits intérieurs qui
prennent aujourd’hui une expression offensive jusqu’en Europe et qui s’adhèrent
à l’idée née au début du Xe siècle autour d’une unicité historique Atlantique.
On assiste à la réunion explosive de questions identitaires américaines et d’une
histoire proposée comme quasi
fusionnelle avec les Européens.
Sur ce point important, il faut
bien se souvenir que la guerre d’Indépendance américaine puis la naissance des
Etats-Unis ont été vus comme un événement par les puissances européennes d’alors
comme partie intégrante de leur espace géographique ; que ces même
puissances qui devinaient bien que les Etats-Unis voudraient aller jusqu’au
Pacifique échafaudèrent des plans pour contenir tout développement territorial.
En réalité, les cabinets politiques du XVIIIe siècle qui s’entendaient autour
de l’équilibre de puissance voulaient l’appliquer au continent américain. La
Révolution française a remisé ces projets. La chute de la Bastille a donc
libéré également les Américains de tous les calculs européens.
Le mouvement Black Lives matter
dans ce qu’il perpétue rencontre d’autres forces telluriques qui allient l’histoire
et un projet sinon de nouvelle histoire d’une aire géographique lavée du pêché.
Ni l’Asie, ni l’Amérique latine,
ni l’Afrique, ni l’Orient n’entrent dans cette aire, elle est bornée à l’Europe
(surtout celle à façade Atlantique) et aux Etats-Unis. Un angle qui n’interpelle
pas et qui, pourtant, éclaire bien que les assauts menés contre nos Histoires ramèneraient
au titre de l’ouvrage de Huttington : Qui sommes-nous ?.
Les Européens et les Etats-Unis s’éloignent,
ce décrochage aurait débuté en 1789, sur le plan culturel ou artistique les Américains
s’émancipent du « vieux continent » au début du XXe siècle.
Nous pourrions en reprendre
conscience si les Etats européens arrivaient à s’autonomiser, à penser
autrement que par le seul prisme des campus américains. Les Etats-Unis nous
renvoient leurs propres maux quand l’Europe est très en peine de s’entendre sur
ce qui l’unit, la fonde, la projette.
Avant même la question
américaine, les féodalités surgies après l’empire romain n’étant, ni Etat, ni
nation, crurent par les Croisades en Asie quelles appelèrent l’Orient définir l’Occident.
Le Qui sommes-nous ou Qui
devrions-nous être des deux côtés de l’Atlantique, est une question redoutable
qu’un simple fait divers tragique démultiplié par les modernités technologiques
revient en boomerang, mettant à nu bien des failles et des ambitions contraires.
Jean Vinatier
Seriatim 2020
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