Idriss Déby est-il tombé lors de l’offensive lancée au Fezzan (Kanem) sur un champ de bataille contre les FACT (Front pour l’Alternance et la Continuité du Tchad) de Mahamat Madhi Ali, rallié au maréchal Haftar ou bien a-t-il succombé à une rivalité interne dans son ethnie Zaghawa (Bedeya contre Kobe)?
Le Tchad est un pays complexe : un sud francophile, chrétien (catholique, protestant) et animiste, un nord arabo-musulman que la Libye contesta longtemps dès 1969, la fameuse bande d’Aozou où est le Tibesti rendu célèbre par l’affaire Claustre.
Les chefs d’État qui se succédèrent depuis 1960, un seul était du sud, François Tombalbaye, les suivants, Goukouni Weddaye (79-82), Hissene Habré (2982-1990) et Idriss Déby en 1990 viennent du nord. La famille Déby est plus particulière par son appartenance ethnique, celle minoritaire des Zaghawa située au nord-est du Tchad et au Soudan (Darfour du nord). Une ethnie au contact avec ce nord tchadien contesté par la Libye plus que sensible aux rebondissements des guerres intestines libyennes et bien placée sur les différentes routes caravanières.
Quoique le Tchad ne manque pas d’atouts économiques (pays exportateur de pétrole via les compagnies américaines et malaisienne : Exxon-Mobil, Chevron, Petrolas), il pâtit de la corruption de ses dirigeants. Selon les Panama papers la famille Déby aurait une fortune évaluée à près de 11 milliards de dollars. Sur le plan humain, le Tchad est régulièrement signalé pour les répressions intérieures. C’est peu dire que la France qui se targue des droits de l’homme ferme les yeux, la guerre au Sahel obligeant à une realpolitik que toute la classe politique ici accepte !
Le QG de Barkhane installé à N’Djamena montre toute l’importance que la France apporte à la solidité de l’appui tchadien dont le président Déby, installé par nous via un coup d’Etat en 1990, était l’acteur principal et qui donnait toute l’apparence d’un combat africain contre Boko Aram et Daech. Dans cette guerre au Sahel, le Tchad était le pivot. Qu’en sera-t-il demain ?
La France avait-elle anticipé la disparition de son allié ? En toute logique la France misera sur le fils du défunt, Mahamat Idriss Déby Itno, qui assure l’intérim à la tête du Conseil de transition voudra succéder. L’on nous dit que les FACT combattus n’ont pas d’allié : je répondrai jusqu’à présent ! Ces rebelles ont pour base arrière la Libye où, notamment, la Turquie et la Russie veulent grandir leur influence respective.
Le décès d’Idriss Déby est un choc géopolitique dont le premier effet sera de dynamiser les opposants internes et les ennemis extérieurs avec cette conséquence d’engager plus profondément la France, peu épaulée par les Européens, le second effet une potentielle implosion du pays. .A suivre !
Jean Vinatier
Seriatim 2021
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