Le résultat de l’élection régionale madrilène est loin de tout désintérêt pour la France, elle-même à la veille des consultations de juin dont les résultats seront vus dans une optique présidentielle.
A Madrid, les élections ont soulevé un enthousiasme participatif : 76% de participation, soit 12 points de plus !
La présidente sortante, Isabel Diaz Ayuso,, à l’origine de cette élection anticipée, emporte son pari haut la main, frôlant la majorité absolue avec 65 sièges sur les 136 et n’hésitera pas, comme elle le disait dans sa campagne, à accepter l’appui de Vox qui améliore très légèrement son score avec 13 élus. La gauche, elle, manque le coche : le PSOE s’écroule (24) quand Podemos avec 10 sièges regrette amèrement la scission avec Mas Madrid de Monica Garcia Gomez qui emporte 24 sièges. Uni Podemos pouvait devenir la première force d’opposition madrilène : l’échec entraîne le retrait politique de Pablo Iglesias. Quant à Ciudadenos (plutôt centriste), il disparait de la scène !
Le succès d’Isabel Diaz Ayuso ( la Trump madrilène) doit beaucoup à sa gestion audacieuse et pragmatique du COVID par sa devise : Tester, tracer, isoler. Par sa réactivité, dès qu’un foyer apparaissait, le quartier était tout de suite mis en quarantaine. Jamais Madrid ne connut le couvre-feu, le confinement, bars, restaurants, salles de spectacles restant ouverts sous un protocole strict. Le taux d’hospitalisation de la capitale espagnole sera l’un des plus bas de toute l’Union européenne !
Sa victoire, Isabel Diaz Ayuso, la doit aussi à sa campagne en direction des Vénézuéliens, deuxième population latino-américaine en Espagne. Très engagés, très expressifs et bruyants, anti-chavez donc à droite, leur poids de 40 000 électeurs à Madrid n’est donc pas négligeable et ce, d’autant plus, que leur migration ne faiblit pas de même que leur demande de naturalisation. A terme, la communauté vénézuélienne pourrait avoir deux à trois députés dans cette région. La gauche se mord les doigts de les avoir snobés car trop habituée à la réputation négative, datant de l’ère franquiste, des « sur americanos » longtemps bouc-émissaires de tout ce qui n’allait pas en Espagne.
Le peu de publicité que la France accorde à ce résultat n’étonne pas énormément.
Premièrement, la relation décomplexée entre le Partido Popular et Vox offre une opposition totale avec les discours des Républicains vis-à-vis du Rassemblement National lesquels campent toujours sur des principes moraux quand eux-mêmes ont déchiré le résultat du référendum de 2005 ! L’Espagne, la droite brise un tabou qui reste à observer, qui devrait avoir un impact en Europe et en France où le corps électoral de droite s’éloigne de celui de l’état-major des Républicains.
Deuxièmement, la validation par la population madrilène de la bonne gestion de la pandémie qui n’a pas handicapé les activités, économiques, culturelles et sociales quand en France, l’Etat et les municipalités en suivent en rang d’oignon sans qu’une alternative municipale n’arrive sur la place publique ! La France est, certes plus centralisée qu’en Espagne mais, sur le papier, rien n’interdisait à un édile de proposer autre chose !
Troisièmement, l’investissement politique d’une population nouvellement naturalisée, est aussi une source d’enseignement quand en France, on répète en boucle sur leur indifférence. Cependant, les Vénézuéliens étant blancs et hispanophones, leur présence en Espagne ne se pose pas dans les mêmes termes que pour les populations migrées chez nous. Néanmoins, ce mouvement n’est pas négligeable.
Quatrièmement, la forte participation indique bien qu’une population peut surprendre une classe politique et celle française devrait bien prendre garde à ce que d’un coup d’un seul, les gens ne déroutent les prévisions électorales. Rappelons que la stratégie d’Emmanuel Macron n’est pas uniquement de briser encore la droite mais aussi de compter sur une abstention forte indispensable pour que son parti minoritaire dans le pays puisse garder le pouvoir élyséen.
Les Français surprendront-ils ou pas ? Vérité en-deçà des Pyrénées, erreur au-delà ?
Jean Vinatier
Seriatim 2021
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