Par une journée capricieuse, les policiers seront dans la rue appelant tous les responsables politiques à venir les rejoindre, ce qu’ils feront, Jean-Luc Mélenchon excepté, et le ministre de l’Intérieur, Gérard Darmanin, s’y invitera.
Ce gouvernement qui court après les tribunes écrites (militaires, policières et désormais discrètement celles de la magistrature) ne trouve rien de mieux que de se mêler à celles et ceux qui justement, sont dans la rue contre une politique menée, en l’occurrence la sienne !
L’Élysée croit, en mettant Gérard Darmanin au milieu des policiers débuter la déconstruction de tous les mécontentements accumulés depuis des années. Une présence test de Gérard Darmanin qui, si elle n’était pas si négative, échafauderait une opération « bain de militaires » d’Emmanuel Macron le 14 juillet….Les ficelles sont grosses.
La question est de savoir si l’exécutif est conscient ou pas de la profondeur des maux ? Il l’est et c’est bien pour cela que la déconstruction s’emploie. Ainsi la disparition du corps préfectoral laissera la place à des « managers McKinsey », qui gommera la précieuse neutralité de l’État au profit de la seule allégeance politique à un parti qu’Emmanuel Macron estime promis à un long avenir….
Quid de la colère policière plus complexe que celle avancée par les militaires dont la tâche est apparemment plus simple et plus noble, à savoir protéger la France de l’invasion ?
Et pourtant, police, étymologiquement, rappelle le gouvernement de la cité (polis), de même que le mot de politique. La police est aussi fondamentale que l’armée, la première œuvrant à la tranquillité policée quand la seconde prévient de l’arrivée extérieure de l’insécurité. C’est à Louis XIV et à son lieutenant de police, La Reynie que l’on doit la police moderne dont le mot et les règlements s’imposeront au monde entier : c’est le seul mot français aussi mondial !
Faut-il mettre dans le même sac le policier et la force de l’ordre ? Le premier est celui que l’on appelle ou qui prévient un délit, la seconde se lie à la répression lors d’une manifestation. Le ministère de l’Intérieur est quasiment le seul d’Europe à aborder une manifestation autorisée que sous l’angle répressif et plus du tout en accompagnateur ou protecteur. Quand la tactique est de faire monter les tensions même là où elles ne sont pas, chaque manifestation est donc potentiellement source de dommages collatéraux. C’est là un choix politique tant de la gauche que de la droite. D’ailleurs, cette façon de faire interroge aussi sur le sens du droit à manifester inscrit dans la Constitution : qu’est-ce qu’un droit constitutionnel matraqué ?
Lors des manifestations des Gilets Jaunes les violences policières ont été publiques et il a fallu toute la bienveillance de la magistrature, qui piétina dans ce moment nombre de principes envers les citoyens interpellés, pour que les forces de l’ordre ne rendissent pas de compte.
Quel
poids donner aux colères policières que les Français ne lisent plus d’un trait ?
Nos rapports avec la police sont très ambigus, liés à une longue impopularité
de ce corps. Au XIXe siècle, le policier était regardé comme veule et corrompu.
La création d’une police nationale en 1941(un progrès) aura son pendant négatif,
sa large fidélité au régime de Vichy qui laissera de longues traces, de même
que l’histoire cachée des GMR (Groupes Mobiles de Réserve), prédécesseurs par leur structure des CRS, qui
furent plus honnis que la milice ! La popularité de la gendarmerie pâtit de leurs actions.
Évidemment, les policiers et les forces de l’ordre de 2021 ne sont pas des « nazis » ou des « vichystes » mais l’on néglige trop les longues mémoires populaires qui transmettent de génération en génération autant les maux que les bienfaits.
Quand l’armée et la police doutent de leur fonction respective, de leur mission générale et, surtout, qu’elles ne comprennent plus ce pourquoi elles sont, la nation dans son entier s’effrite et atteint la vie démocratique, car le mépris envers les politiques entre aussi dans cette ambiance. Police et politique se retrouvent donc réunis sous le regard national.
Jean Vinatier
Seriatim 2021
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