Si l’Ukraine reste un sujet très préoccupant par les mécaniques américaines enclenchées pour faire plier la Russie et régionaliser l’Union européenne en s’assurant que jamais elle ne jouira de ses ailes, les événements intérieurs américains (États-Unis/Canada) épicentre « du vivre ensemble » du woke, de la cancel culture commencent à peser. Je l’ai écrit à plusieurs reprises, les venues au pouvoir de Donald Trump puis de Joe Biden ont fait surgir des fractures intérieures qui n’ont pas cessé de grandir et de se diffuser sur l’ensemble du continent américain. D’ailleurs, les échecs, plus intérieurs qu’extérieurs, de Joe Biden en font le POTUS le plus impopulaire relançant les débats sur, les fraudes électorales, la marche vers le Capitole en janvier 2021 avec en supplément la renaissance de Donald Trump bien soutenu par Elon Musk, l’homme le plus riche du monde !
Que les convois de camions américains soient sous la coupe d’influenceurs et propagandistes ultras, c’est certain mais les échos rencontrés tout au long des parcours montrent aussi une demande insatisfaite, politique, sociale de vie meilleure, le tout sur fond d’une société nord-américaine encore très marquée par le racisme et indifférente aux égalités. En Europe, c’est plus ambigu même si dans ces moments sociaux les extrêmes sont actifs, n’oublions pas qu’à l’inverse des États-Unis, les matières premières y sont chères avec en sus l’interrogation sur l’inflation dont la nature n’est pas la même des deux côtés de l’Atlantique qui pourrait très bien être, à terme, un vase communiquant.
Aujourd’hui, ces « convois de la Liberté » qui sillonnent les routes, suscitent des expressions similaires en Europe (Amsterdam, Bruxelles, Paris) avec un pic prévu ce week-end. Si de l’autre côté de l’Atlantique, les convois de la Libertés sont très antivaccins, en Europe s’y greffent comme écrit ci-dessus, la vie chère, le coût, de l’essence, du gaz, de l’électricité. Cette convergence des colères serait-elle la convergence des luttes chère aux marxistes ?
Si on est bien dans un registre de colère, de fronde, pas aujourd’hui le moindre corpus politique ou alternative. Il n’est guère étonnant que le pouvoir ne s’alarme pas de trop : de toute façon, les médias répéteront en boucle que ces convois ne seront que des « fascistes », des « nazis » et ainsi de suite comme ce fut le cas contre les Gilets Jaunes.
La France verra-t-elle se relever les Gilets Jaunes au passage de ces camions ? Quand on voit le nombre de gens masqués, les jeunes surtout, on doute d’un sursaut, d’un réveil ? Il y a en France, une acceptation des plus jeunes (je le répète) de la soumission, de l’aplatissement unique en Europe sur fond d’une campagne présidentielle d’une tristesse inouïe avec un Président sortant veillant à ne surtout pas faire campagne misant le tout pour le tout, à la fois « sur les braves gens » et l’abstention.
Au sortir de ces deux années « COVID » et des lois de surveillance indignes, les inégalités se sont creusées quand les fortunes atteignent des sommets, que les dividendes sont réinvestis dans les sociétés qui les accordent, réduisant un peu plus l’irrigation monétaire. En réalité, tout se replie : les riches rient et se claquemurent, les autres errent entre les colères rentrées et les chimères de l’ascenseur social (l’humoriste Gaspard Proust dit "qu’il descend très bien" !!)
S’y greffe aussi une révolte globale par des gens hostiles à la globalisation : premier passage de la mondialisation heureuse à celle qui ne le serait plus ? Difficile de dire si dans un monde liquide, des protestations puissantes peuvent avoir de l’écho et s’agréger, se cimenter.
Cependant, nous sommes au début d’un bouillonnement plus brouillon en Europe qu’aux États-Unis où l’immédiateté des mid-terms et des antagonismes nés des élections de 2016 et de 2020 que nos élites européennes se refusent à considérer n’y voyant bêtement que des ersatz alors même qu’une partie centrale du pays est entrée dans une défiance profonde par rapport aux états côtiers américains. Il y a, aussi, aux États-Unis une véritable problématique politique autour de ce qu’est l’identité suscitant des radicalités diverses divisant les élites américaines !
Les convois de la Liberté, feront-ils ces vents forts, demain les tempêtes de sable et de poussière soulevant d’impressionnantes quantité de matières ? Tout dépendra du degré d’asséchement des sociétés liquides, où nous sommes, le réchauffement climatique et ses corollaires migratoires étant des enjeux déjà sur la route : la poussière est bien à l’horizon, cette ère des soulèvements selon Michel Maffesoli ?
Jean Vinatier
Seriatim 2022
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