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mardi 8 février 2022

Macron face à Poutine : seul N°5795 16e année

 

Un avion présidentiel atterrissant à Moscou, une porte s’ouvre, un homme seul en descend, un vague tapis rouge en bas des marches, pas un officiel seulement le personnel de l’aéroport…puis bien montré aux médias, cette longue table, Vladimir Poutine, Emmanuel Macron, chacun à un bout…On ne pouvait faire plus glacial et plus déstabilisant pour le Président français oui et non mandaté par l’Union européenne mais agissant comme Président du conseil de l’Union. Au même moment, le chancelier allemand, Olaf Scholz débarquait à Washington pour s’assurer de North Stream II.

Le désordre européen ne pouvait être plus complet. Il faudra toute la flagornerie de la presse française pour auréoler le successeur de François Hollande et insister sur son « affection » pour la prise de risque. Certains écrivent qu’Emmanuel Macron risquait gros lors de ce périple, campagne électorale oblige. En réalité la politique étrangère indiffère les Français à moins d’une peur atomique ou que les appelés ne partent au combat comme en Algérie.

Du point de vue de Vladimir Poutine, ce déplacement, sans puissance sans distinction claire de la politique menée par les États-Unis via l’Otan, est du bruissement servant seulement à montrer qu’il n’est pas un va-t’en guerre. D’ailleurs, aucun parti ne voulant assumer une guerre au sens propre, les publics assistent à une sorte de course à l’échalote à qui en fera le plus pour afficher son sourire, ses propositions, ses sincérités alors même que se renforce le face à face imposé par les États-Unis au monde contre la Chine.

Sans souveraineté, il n’y a pas de politique. Les États-Unis sont souverains, ils font donc de la politique tout comme la Chine, la Russie, le Royaume-Uni. La France n’est plus souveraine en ce sens où pour parfaire à la construction européenne, elle a accepté de se défaire progressivement de ce qui avait fait son ciment : liberté et indépendance quand l’Allemagne, détruite en 1945 s’est patiemment, quel que soit le parti aux affaires, rebâtie et qu’aujourd’hui, parce qu’au centre du dispositif bruxellois, se croit à nouveau à la première place, négligeant ses propres faiblesses.

L’Union européenne n’est vue par Moscou que comme de dociles supplétifs américains sur fond de souvenirs historiques dramatiques quand la Russie puis l’URSS se montra hégémonique en 1945 à la suite de l’accord avec Washington. Ce partage de l’Europe est le fait de deux capitales, ne l’oublions pas !

Aujourd’hui, l’Ukraine est un centre nerveux qui n’est pas sans rappeler un petit peu l’éclatement de la Yougoslavie voulu autant par Berlin que par Washington. L’Ukraine est une puissance blette dont on voit bien qu’elle est en réalité déjà partagée (partie russophone du Donbass, partie occidentale) et que si ce partage pouvait ricochet jusqu’en Biélorussie et en Russie, les États-Unis n’y verraient rien de négatif. Il faut bien savoir que dans les bureaux américains, l’idée est bien d’affaiblir la Russie, de l’éclater et que la Chine suivrait puis viendrait le tour de l’Inde.

Les États-Unis parce qu’ils maitrisent d’un bout à l’autre la narrative imposent sur le plan géopolitique une sorte de Netflix avec des saisons thématiques. Par son soft power, elle scénarise. Par sa puissance propre, la première encore, elle fléchit les récalcitrants. Par sa monnaie et ses avancées technologiques, elle a un échelon d’avance. Par ses implantations militaires et l’Otan, elle cercle le monde.

Sans faire loin de là de la Chine et de la Russie des puissances iréniques, les États-Unis sont, malgré tout, la seule nation la plus belliqueuse, la plus sourcilleuse de peur de déchoir de perdre alors son messianisme. Les États-Unis sont des missionnaires bottés, adeptes du prosélytisme.

Emmanuel Macron a commis l’erreur d’aller vers Vladimir Poutine comme on joue à la roulette russe alors que toute la tactique aurait été de recevoir à l’Élysée le chef d’État russe. Mais voilà faute de politique la communication oblige aux mouvements et aux agitations surtout lors d’une période électorale d’où ce vol vers la Moscovie. Il y avait un peu de Canossa que le déplacement, ce mardi,  à Kiev n’effacera pas où l’on verra deux pays, l’Ukraine et la France, sans souveraineté pleine et entière se caresser de certitudes et de principes rédigés par une tierce puissance….

 

 

 

Jean Vinatier

Seriatim 2022

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