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vendredi 25 février 2022

Ukraine et après ? N°5813 16e année

Tandis que les places financières accusaient le choc de l’invasion russe en Ukraine, celle américaine passait dans le vert…Wall Street estime premièrement la victoire russe actée, un conflit court avec l’installation d’un gouvernement pro-russe à Kiev, secondement l’assurance d’un second marché gazier vers l’Europe….

Les acteurs financiers sont très éloignés des articles partiaux qui inondent les médias français et nous rappellent, parfois des expressions et vocabulaires des années 30/40. On est effaré de relever que l’on vous impose une ligne, un discours, une attitude : c’était le cas lors du référendum de 2005, idem pour le Kosovo, l’Irak en 2003 (avec des bémols du fait du choix de Jacques Chirac)

Cela étant dit, si les Russes s’emparent de Kiev, quelle serait la suite ?  Autant peut-on expliquer l’évènement en cours, autant on est dubitatif sur l’après…Qu’est-ce qui amènerait une négociation sur l’Ukraine ‘(et la Biélorussie) ? Le président ukrainien, Zélenski a dit hier sa déception par le peu d’engagement militaire de l’Europe et des États-Unis et qu’il était prêt à discuter d’une neutralité avec Moscou.

Nous avons donc un président ukrainien face à une armée russe supérieure en tout sans assurance d’un engagement armé de l’Otan.

Cette neutralité, est justement celle qui a débouché sur cette invasion territoriale. Cette neutralité ukrainienne est-elle envisageable ? Pourquoi les États-Unis refusent-ils de détacher la Russie de la Chine ? Vladimir Poutine n’a jamais été un adversaire de principe des Américains, c’est même une constante de la politique russe depuis Alexandre Ier (paix de Gand), Alexandre II (Alaska). La guerre froide elle-même, était une répartition d’égale à égale entre Moscou et Washington.

Ont joué deux facteurs perturbateurs de cette « égalité » : d’abord des courants intellectuels, économiques et géostratégiques américains, américanophiles autour d’une « fin de l’histoire » pour un monde unipolaire sous une égide messianique unique avec quelques ersatz du maccarthisme, ensuite du côté sovieto-russe, la conscience d’un déclin (échec de la guerre des étoiles) et l’espérance d’une après URSS dans la cour des grands. L’échec de Gorbatchev, intérieur et extérieur (pérestroïka, mur de Berlin, Afghanistan) culmina avec l’adhésion massive à l’Otan des ex-pays membres du pacte de Varsovie puis sous la présidence de Boris Eltsine. La Russie, à la fois n’a pas compris pourquoi elle n’avait plus cette correspondance avec les États-Unis et pourquoi elle ne devait plus être qu’une force supplétive à l’instar de l’Union européenne. La Russie s’estime être un monde tout comme la Chine qui se vit et se voit en monde, le messianisme en moins.

Est-ce que le terme de la question ukrainienne pourrait clore ce dialogue de sourd entre Moscou et Washington ? Cette fameuse neutralité est vue depuis l’Otan comme un moyen d’arriver à ses fins, depuis la Russie comme une sureté.

Qui veut dialoguer ? Les sanctions sont prises pour pailler une intervention armée de l’Otan. Mais quelles seront les efficacités de ces décisions ?

Elles paraissent de l’ancien temps où les économies étaient infiniment moins interdépendantes les unes avec les autres : ne pas pouvoir interdire SWIF à la Russie est très éclairant. Cette interdépendance qui répondait à un processus de mondialisation dans lequel, jusqu’à présent, l’aire Atlantique (Europe/USA) trouvait les moyens de rester aux premières places, les années suivantes acteront, du fait même de la montée de l’Asie (asiatique et orientale), du réchauffement climatique, des flux migratoires et bien sûr des innovations technologiques et scientifiques, des défis et des secousses.

En choisissant d’envahir l’Ukraine, sans déclaration de guerre, Vladimir Poutine a mis à vif la plaie, a fait voler en éclat bien des faussetés, a démasqué les manœuvres que découvrent le pauvre ukrainien Zélenski. Si l’on comprend bien que la Russie a intérêt à assumer un conflit court, qu’est-ce qui conduirait les États-Unis à l’acter ? Les hystéries républicaines et démocrates ne laissent pas prévoir une rationalité d’autant plus que les États-Unis sont en proie à des antagonismes politiques très sérieux dont les mid-terms seront un marqueur. Le vert de Wall Street devrait retenir les élus américains pour les amener à plus de raison.

La Russie serait-elle prête à assumer l’Ukraine comme l’Allemagne de l’Ouest le fit avec celle de l’Est ? La masse des ukrainiens se tournerait-elle définitivement vers l'Ouest avec une forte haine de la Russie ou bien une cassure géographique, ethnique, etc... permettrait qui  à Moscou de mettre le pays dans son orbite au-delà du Donbass et de la Crimée ? Aurait-elle alors le soutien chinois ? L’Europe ficelée par les États-Unis est impuissante à être politique, à garantir la neutralité ukrainienne. La presse française qui tresse des louanges à Emmanuel Macron encense son idée de souveraineté européenne, présentement une chimère, une comédie pour la présidentielle en cours. Je ne dis pas qu’Emmanuel Macron a tort sur le fond mais menotté comme il l’est, comme toute l’Union, ses incantations s’abaissent au niveau que la « diplomatie climatique » d’Anne Hidalgo pour abattre Poutine.

Si l’après pose question, l’on sait déjà que la grande perdante est l’Europe : ne nous leurrons pas, si le règlement intervenait en Ukraine il le serait entre Poutine et Biden et entre les deux qui sait une soupe pékinoise….

 

 

 

Jean Vinatier

Seriatim 2022

 

 

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