Plus jamais ce duo ? L’engrenage
parait bien huilé, chacune des parties trouverait son intérêt : rente politique pour la famille Le Pen,
assurance pour les soutiens macronistes. La démocratie française est désormais
bloquée, évidée, déconstruite segment par segment avec le concours autant des
électeurs de la droite que ceux de la gauche convaincus d’empêcher tous les
cinq ans, la bête d’arriver à la charge d’Augustus alors même que ces derniers
confortent celui qui les enserre chaque fois davantage.
En réalité Marine Le Pen et
Emmanuel Macron ont une responsabilité égale dans ce cheminement dramatique. D’abord
Marine Le Pen parce qu’elle ne montre jamais sa volonté de vaincre, se contentant
d’opposer, de sourire. C’est quelque chose que les gens sentent ou devinent. Même
pour un militant RN, douter que sa présidente ait envie d’entrer à l’Elysée a
un effet négatif plus large qu’on ne le pense. Sa campagne de 2022 a été une
presque non-campagne. Ensuite Emmanuel Macron, même si l’on fait fit de son
arrogance, de son mépris, sa mécanique, cynique et vicieuse, lui permet d’installer
un despotisme, qui pourrait aller jusqu’à la dictature (au sens romain du
terme), sans rien toucher aux décors institutionnels et démocratiques :
simplement les celles et ceux qui gèrent et géreront les scénographies sont/seront
remplacées par d’autres, par exemple, les cabinets de conseil, les lobbies…etc
Sous couvert d’une
béatitude européenne et d’une soumission aux vues anglo-américaines libérales globalistes,
à laquelle une partie de la gauche adhère, Emmanuel Macron dépose et repose les
pierres souveraines françaises mais creuses. Hier soir au Champ de Mars où se
termina la liberté gauloise (défaite des Parisii face à Rome), il se fit naturellement
le chantre de tas de choses plus inquiétantes les unes que les autres qui ne perturbera son électorat reposant sur deux piliers : les jeunes
18/24 ans (trottinettes) et les
retraités (déambulateurs) c’est-à-dire celles et ceux qui ne sont pas entrés
dans la vie active et celles et ceux qui l’ont quittée, entre les deux une France
active généralement hostile à Emmanuel Macron sauf une partie très urbaine,
très connectée et volontairement acculturée politiquement choisissant
réellement de ne voir que leur pognon et leur adhésion à un ordre mondial
Atlantique, sous couvert d’amour pour les migrants, les animaux, les herbes
folles, gage de leur sécurité financière.
On a donc ce paysage assez
exceptionnel d’un Chef de l’État dont les piliers reposent majoritairement sur
les Français hors vie active. C’est là un problème. Ce n’est pas normal. C’est
vrai mais si l’on se place sous le seul angle de la possession étatique et
gouvernementale pour imposer une idéologie, un programme, ces deux piliers là
sont très pratiques avec la minorité active, de gauche comme de droite, jouant
le rôle balancier au second tour contre « la bête », elle aussi bien
domestique.
On voit bien de quelle
façon les institutions et la vie démocratique se dévoient sous la férule d’acteurs
qui obéissent à des objectifs précis, clairs qu’ils ne cachent pas au public sans
que ce public citoyen ne regimbe et s’il le fait comme nous le vîmes en
2018/2019, les forces d’un ordre policier et judiciaire s’abat impitoyablement,
les lois liberticides suivant la matraque. Ce quinquennat a pu aller très loin
dans la prise de contrôle des citoyens par COVID interposé (passe vaccinal,
passe sanitaire, demain passe social à l’échelle européenne). Sur ce point la France
et l’Europe se sinisent parfaitement avec la bénédiction des 1% et des urbains trottinettes.
Au-delà des répressions se
greffent l’utilisation des diversités françaises par l’actuel chef de l’Etat
pour accélérer la segmentation nationale sous couvert d’un idéal européen que
ni les Allemands ni les américains ne
veulent. Ces diversités (ethniques, religieuses, sociétales…etc) parmi elles LGBTQ+
jouent un rôle dynamique parfaite dans l’atomisation de l’individu sous couvert
d’amour des autres, de respect. Elles sont la distraction et nourrissent l’émotionnel
du quotidien qui balaie le national (le collectif) au profit de la personne.
Question pourquoi Berlin et Washington laissent opérer le discours d’Emmanuel
Macron ? Tout simplement parce que la dilution française y est vue
positivement : pour l’Allemagne, l’assurance
de plus avoir de concurrence, pour les États-Unis la certitude de la fin de l’exception
française (parenthèse gaulliste). Question : Emmanuel Macron est-il conscient
de ce qu’il fait ? Oui mais il est lui-même sevré…
Ce paysage politique
français désastreux l’est encore plus faute d’alternative. L’atout maitre des
dirigeants présents étant de faire leur la phrase de Margaret Thatcher : « There
is no alternative (TINA) ». La France est en même temps dans une situation
de blocage démocratique et de déconstruction nationale méthodique et perverse. La
construction nationale commencée autour du XIIe/XIIIe siècle sur deux piliers,
liberté et indépendance que la Révolution voulut renouveler sous le coup d’idées
nouvelles qui infusaient depuis la Réforme, est, présentement une ruine/désert
que l’on visite comme le XVIIIe siècle su la mettre en scène (désert de Retz). (Lire
l’Histoire universelle des ruines d’Alain Schnapp).
Ruine est le maitre mot
sans que cela nous plonge dans un état d’abandon. Il faut au contraire dépasser
la ruine, le désert et construire quelque chose de neuf, de plus fort. L’échec
de la campagne d’Eric Zemmour refusant de proposer une nouvelle histoire
nationale est symptomatique de l’impuissance des idées souverainistes qui n’ont
plus dans la besace que la nostalgie, la mélancolie.
Pour clore très temporairement
ce lendemain présidentiel tragique et face aux années immenses dans lesquelles
nous entrons : marchons et bâtissons. Au début ce ne seront que des
vagabonds (philosophes errants et non des mendiants), ensuite viendront le
cortège qui prendra forme. Il faut faire en sorte que les ruines d’aujourd’hui
deviennent les pavés (routes) de demain. Cette déconstruction française qui s’opère
quand l’aire Atlantique (États-Unis/Europe) essaie de se réapproprier l’Asie,
les prolégomènes sanglants étant la guerre en Ukraine doit débuter notre réappropriation
mentale pour reprendre notre liberté qu’un système qui se dit démocratique sinon
nous confisque, nous censure.
Jean Vinatier
Seriatim 2022