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dimanche 12 mars 2023

Chine stabilise Iran/Arabie, USA déstabilise Georgie N°5649 17e année

 

La Chine a surpris le monde en annonçant que sous son égide, Téhéran et Riyad reprendraient leurs relations diplomatiques sous deux mois. Peu de temps après les déclarations pékinoises sur le conflit en Ukraine, le Président Xi Jiping, réélu, continue à avancer ses pions tel un joueur de go. En réalité, c’est l’Asie entière qui se meut….

J’écrivais au début du conflit en Ukraine que je pressentais un bouleversement et que si cette situation perdurait les effets  se multiplieraient. Nous venons de passer la première année de guerre ; déjà le panorama géopolitique se modifie, parfois avec une espérance positive (Chine/Iran/Arabie), parfois avec une inquiétude (USA/Europe essayant d’étendre le champ conflictuel en Moldavie et Géorgie (Caucase). Effectivement, on ne peut séparer l’accord pékinois des derniers événements, moldo-transnistrien, géorgien.

Concernant l’Ukraine, si la ville de Bakhmut tient, il s’agirait d’une victoire kiévienne, dans le cas contraire, un succès russe sans importance…Les regards se portent davantage sur l’arrière-cour du conflit. D’abord entre la Moldavie et la Transnistrie (la Roumanie les lorgnent) où chacun s’accuse de vouloir renverser qui la Moldavie, qui le président transnistrien. La Russie tient la Transnistrie d’abord par une puissante division militaire et ensuite via ses casques bleus installés à la frontière. Moscou n’a pas d’intérêt à déstabiliser cette région. A des centaines de kilomètres de là, la Géorgie  a fait face à des manifestations « spontanées » contre un projet de loi, réunissant majoritairement le parlement, portant sur le contrôle des activités des ONG étrangères. Comme en février 2014 à Maidan les euro-américains ont excité la foule, avec le soutien, ici, de la Présidente. Au-delà, de ce projet de loi abandonné, se raviveraient les statuts des républiques autonomes d’Ossétie du sud et d’Abkhazie au sein de la Géorgie comparables au Donbass ukrainien. On se souvient de la folle entreprise de 2008 du président Saakashvili qui avait défié l’armée russe, évitant de peu son renversement !!! Ces manœuvres dans ce Caucase sont infiniment plus dangereuses que celles escomptées en bordure de la Roumanie et de l’Ukraine. A peu de distance de là, les tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan au sujet du Haut Karabagh viennent de donner lieu à des affrontements sanglants.

On comprend bien que le calcul américain serait de disperser la puissance russe sur plusieurs champs, il ne faudrait pas que par ricochet surgissent des conflits impliquant des puissances régionales : Turquie, Iran…. alors même que l’ensemble de l’Asie (orientale, asiatique) revoie leurs rapports internes à leur manière sous l’effet du conflit en Ukraine. Il faut bien insister sur ce point, l’offensive russe de février 2022 qui est un aboutissement de manœuvres et de calculs des euro-américains a appuyé le bouton déstabilisateur que l’Asie, l’Afrique, l’Amérique latine ont très bien appréhendé.

Ainsi l’acceptation arabo-persane de se parler à nouveau est vue comme une victoire chinoise qui a valeur d’armée en soutien à la Russie. La Chine ne soutient pas tant la Russie dans son agression qu’elle ne relève le côté nocif et déstabilisant du jeu occidental (ou aire Atlantique).

Dans Orient XXI, James Dorsey évoque un MBS « funambule » dans un « surprenant accord ». L’Arabie saoudite ne tient pas à rompre avec les États-Unis, elle voudra, comme ses semblables asiatiques, devenir un point de passage obligé entre l’extrême-Asie et l’extrême-Atlantique, l’Europe n’étant plus qu’une civilisation réduite pour des dizaines de millions touristes flâneurs. Que se mette en place et s’accroisse une force transcontinentale comme les BRICS donnera une idée supplémentaire de la métamorphose en cours qu’une hyperpuissance prédestinée (États-Unis) aura bien du mal à admettre et qu’elle combattra ! L’article de James Dorsey rend bien compte de cette inquiétude qui ne parvient pas à croire au sérieux de cet accord et que MBS aurait une politique. Or, il l’a…c’est plutôt l’Europe qui n’a plus de politique….

Personnellement je crois à l’équilibre entre les puissances que les Européens cherchèrent à établir aux XVII et XVIIIe siècles et que le congrès de Vienne voulut rétablir autour de la légitimité. Le XXI siècle supporte de moins en moins bien la prépotence américaine et l’intérieur étatsunien fracturé fait reposer l’envie impériale sur le consentement d’autres puissances à mourir pour sa perpétuation. Le monde multipolaire est plus sûr que celui unipolaire même conduit par une démocratie messianique qui aurait nécessairement son pendant totalitaire.

Note:

Sous égide chinoise, le surprenant accord entre l’Iran et l’Arabie saoudite par James Dorsey

https://orientxxi.info/magazine/sous-egide-chinoise-le-surprenant-accord-entre-l-iran-et-l-arabie-saoudite,6295

 

Jean Vinatier

Seriatim 2023

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