Sur les conseils de l’Intérieur, Emmanuel Macron renonça à se rendre au stade de France où étaient les publics hostiles, il n’y eu donc pas de manifestation sauvage à Paris ce week-end. Les affrontements se déplacèrent en province à Sainte Soline où écolos et forces de l’ordre se livrèrent à de véritables combats : il n’était plus question de la contre-réforme des retraites mais d’écologie contre les grandes bassines. Ces ordres donnés de taper et de retaper étaient pour les Français un message, notre maintien de l’ordre sera plus dur qu’au moment des Gilets Jaunes : pour résumer, tout ce qui proteste, quel que soit le motif (sauf wokiste, indigéniste…etc) sera tétanisé…
Le rassemblement du mouvement Horizons d’Édouard Philippe présenté comme rassembleur du camp présidentiel avait des relents de parti versaillais : n’oublions pas qu’Édouard Philippe fulminait davantage qu’Emmanuel Macron contre les Gilets Jaunes et qu’il représente bien plus que le Chef de l’Etat le bloc bourgeois comme il le fut lors de la Commune en 1871. Sur le plan victimaire, le camp macronien donna de l’ampleur au « coming out » du ministre Dussopt , aux twittes et mails adressés , notamment, à Aurore Bergé et à la Présidente de l’Assemblée nationale : si leur contenu était odieux, il n’en fallait pas moins les porter à l’autel de la Victime pour émouvoir l’opinion publique…
La semaine à venir s’annonce puissante avec déjà quelques petits craquements, d’abord de la part de Jean-Luc Mélenchon qui aimerait un peu plus de modération, de Laurent Berger de plus en plus mal à l’aise au milieu de la rue qu’il craint. En réalité, tous redoutent la perte de contrôle des colères, des révoltes. Les syndicats ont allumé une mèche qui arrive vers des barils qui ne sont pas les leurs. Et c’est bien ce qu’Emmanuel Macron veut faire passer comme message, qu’il opte pour une répression politico-sociale existante depuis le 17 juillet 1791. L’Élysée est dans la logique historique d’un pouvoir de classe ou d’un corps électoral très mobilisé. Aujourd’hui (depuis 2017) et quoique minoritaire ce corps électoral s’impose dans les urnes face à une majorité abstentionniste et dispersée, à des partis opposés qui ne sont fédérateurs ni entre eux ni auprès des Français.
Emmanuel Macron, tout à fait assuré de la discipline policière et judiciaire, de l’approbation européenne et des fonds étrangers, se sent les coudées franches : il se vêt en Metternich ! Rappelons que le Congrès de Vienne (1814-1815) pour éviter le retour des calamités, prévoyait un soutien automatique entre les États confrontés à des révoltes : ainsi, les congrès de Troppau, de Laybach (1820-1821) lors des tensions dans les États italiens, l’Espagne, le Portugal.
.Nul ne peut savoir comment se déroulera cette nouvelle journée de manifestation si elle sera explosive ou bien une gueulante avec ici et là des groupuscules. Il est dommage que les intellectuels (il vrai majoritairement plutôt wokistes) et les influenceurs ne soient pas dans les rues (sauf Frédéric Lordon) : rien ne remplace le terrain et le contact physique avec les gens, idem pour les politiques trop peu publics. Cela manque, cela empêche la progression d’un corpus intellectuel indispensable pour aller plus loin que l’actuelle contre-réforme. Mais les Français ont-ils envie d’aller plus loin, Alain Bauer disait justement que la crise présente était dans la continuation de celle inaugurée par les Gilets Jaunes. Elle restait, néanmoins, à l’état de « bouillon » qui ne parvient pas à prendre. C’est là le résultat de la fin, d’idéologies dépassées, de la souveraineté, de l’idéal national, du monde liquide qui absorbe tout (on le voit avec les banques, les conflits), de l’abolition des distances qui empêche le recul…etc. Il est donc très difficile de se reconstituer, de retrouver des repères, de proposer une alternative politique…et puis la France est un pays de vieux (moyenne d’âge 47 ans !), un corps électoral à son image pleinement égoïste (il a joui de la Reconstruction, des Trente glorieuses….et même de Mai 68) soucieux seulement de la pérennité de la retraite : Bruxelles encourage la Lituanie à proposer un départ à 72 ans…. L’égoïsme du vieillard est terrible.
Ainsi, Emmanuel Macron assuré des médias entre les mains de ses soutiens électoraux tient la dragée haute, certain d’être le parti de l’ordre et des « honnêtes gens », après avoir bridé le parlement (47,1, 49,3) tient la dragée haute aux syndicats : Canossa ou la matraque. Seul le Conseil constitutionnel pourrait jouer un rôle apaisant mais avec comme membres, notamment, Laurent Fabius, Alain Juppé, Jacqueline Gourault, le doute s’instille….
Dernier point Emmanuel Macron voudra-t-il aller au-delà de cette crise, c’est-à-dire la pousser à un point tel qu’il pourrait envisager une dissolution, en escompter une majorité puis modifier la Constitution et donc envisager un troisième mandat… ? A suivre…..
Jean Vinatier
Seriatim 2023
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